Sur l’initiative No War but the Class War

S’il est vrai que toute guerre impérialiste met au jour la base de classe réelle sur laquelle repose les antagonismes politiques, l'invasion de l'Ukraine n’a pas échappé à la règle. L’attitude de la gauche du capital (comprenant les staliniens, maoïstes, trotskistes, etc.) a été soit le soutien pur et simple à l'un ou l'autre des fronts impérialistes (OTAN ou Russie), soit un faux pacifisme qui cache les mêmes positions. Cette guerre a profondément divisé l'anarchisme entre les véritables internationalistes qui s'identifient aux intérêts profonds de la classe ouvrière, et les défenseurs moralistes de « l'indépendance de l'Ukraine » qui ne veulent pas voir que premièrement, derrière l'Ukraine, se tient l'OTAN, et que deuxièmement les victimes de la guerre sont la classe ouvrière partout dans le monde. Les anarchistes pro-Ukraine ne voient pas que si cette guerre a pour théâtre le sol ukrainien elle ne se limite pas aux dimensions de ce pays. Pour eux il s'agit simplement d'une grande puissance qui s'empare d'une plus petite, alors même qu'il s'agit en fait d’un moment dans le conflit mondial suscité par ce système en crise, qui engloutira non seulement les belligérants actuels mais également le monde entier à mesure que la lutte réelle pour l'hégémonie entre la Chine et les États-Unis occupera le premier plan Les souffrances de l'Ukraine sont certes la continuation de conflits similaires plus lointains, mais celui-ci auquel nous assistons a éclaté dans une conjoncture globale dans laquelle les options du capitalisme mondial se sont réduites en l’absence de pistes crédibles de sortie de la crise structurelle du capitalisme.

Pour sa part, la Gauche communiste internationale est restée fermement attachée aux intérêts internationaux de la classe ouvrière et a dénoncé cette guerre pour ce qu'elle est. La TCI a poussé plus loin la position internationaliste en essayant de travailler avec d'autres internationalistes qui peuvent voir les dangers pour la classe ouvrière mondiale si celle-ci n’avait pas sa propre réponse au défi lancé par la guerre. C'est pourquoi nous avons rejoint l'initiative visant à développer des comités au niveau local, partout où nous sommes présents, afin d'organiser une réponse à ce que le capitalisme prépare pour les travailleurs du monde entier. Nous n'en sommes qu'au début de ce travail et tous les internationalistes ne l'ont pas encore rejoint. Beaucoup n'ont pas compris ce qui est en jeu et certains n'ont pas compris que nous devons ouvrir la voie à une organisation pratique maintenant, pendant que nous le pouvons encore et avant qu'il ne soit trop tard. Le document suivant n'est pas seulement un bilan de ce que nous avons vécu après un an d’expérience de No War But Class War (NWBCW), c'est aussi une clarification de ce dont il s'agit et, nous l'espérons, un moyen de dissiper les doutes et les malentendus.

NWBCW : ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas

Avant même l’invasion de l’Ukraine, la TCI pointait la dangereuse accélération des tensions sur l’arène internationale.(1) Deux mois plus tard débutait l'invasion russe de l'Ukraine et tout ce qui s'est passé depuis n'a fait que confirmer cette analyse initiale : il ne s'agit pas seulement de l'Ukraine, mais de la menace d'une guerre généralisée. Quinze mois plus tard, la guerre actuelle n'a fait qu'approfondir les lignes de fracture dans l'ordre capitaliste mondial.(2)

Elle a conduit à un conflit ouvert entre les États-Unis et leurs alliés contre la Russie. Cette escalade n’a pu avoir lieu qu’après l'armement de l'Ukraine par les États-Unis à partir de 2014, en réponse à l’annexion de la Crimée par la Russie et à la mise en place d'entités pro-russes à Louhansk et Donetsk. Ce programme de réarmement est devenu une menace sérieuse pour les provinces séparatistes et a conduit à l'invasion, qui à son tour a conduit à l'arrivée d'encore plus d'armes occidentales en Ukraine pour soutenir sa résistance. Comme nous l'avons écrit ailleurs, cette situation a déclenché une nouvelle course aux armements imparable, qui ne se limite pas à ce théâtre de guerre.(3) Les États-Unis n'ont pas manqué l'occasion de condamner les ambitions de la Chine et les deux parties ont intensifié leurs manœuvres hostiles dans la mer de Chine méridionale. Alors que Poutine a réuni l'Occident au sein de l'OTAN, le régime de sanctions contre les régimes russe, chinois et iranien a rapproché ces derniers dans un pôle opposé.

La guerre en Ukraine est donc devenue un moment décisif qui menace de devenir critique pour l'humanité. Étant donné que les travailleurs composent la seule classe qui possède des intérêts communs mondiaux et le pouvoir ultime de stopper la fuite en avant vers l'abîme dans laquelle le capitalisme est engagé, il est urgent de soutenir ses efforts de prise de conscience quant à l'importance des enjeux actuels. La baisse du niveau de vie que nous connaissons aujourd'hui n'est qu’un prologue avant d’autres mauvais coups que la guerre impérialiste généralisée de demain infligera à notre classe. Au cours des quatre dernières décennies, la classe ouvrière a principalement occupé le rôle de spectateur devant la scène de l’histoire. Il est nécessaire qu’elle quitte cette position et se transforme d'objet des rivalités capitalistes à sujet de la lutte pour une société nouvelle. C'est pourquoi, en avril de l'année dernière, la TCI a lancé un appel aux véritables internationalistes de toutes les organisations politiques ou non organisés, pour qu'ils forment des comités locaux sous la bannière NWBCW.(4) Le premier comité local composé de membres de la CWO et d'autres individus, appartenant ou non à des organisations, a été formé à Liverpool en mars de l'année dernière(5) sur la base des cinq principes suivants :

  • Contre le capitalisme, l'impérialisme et tous les nationalismes. Aucun soutien à chaque Capital national, au « moindre mal » ou aux États en formation, aux « Démocraties » contre les « Totalitarismes ».
  • Pour une société où les États, le travail salarié, la propriété privée, l'argent et la production pour le profit sont remplacés par un monde de producteurs librement associés.
  • Contre les attaques économiques et politiques que la guerre actuelle, et celles à venir, vont déchaîner contre la classe ouvrière.
  • Pour la lutte auto-organisée de la classe ouvrière, pour la formation de comités de grève indépendants, d'assemblées de masse et de conseils ouvriers.
  • Contre l'oppression et l'exploitation, pour l'unité de la classe ouvrière et le rassemblement des authentiques internationalistes.

Depuis lors, un certain nombre de comités ont été constitués sur une base similaire dans le monde entier, notamment à Glasgow, Paris, Montréal, Toronto, Chicago, Miami, San Francisco, en Turquie et en Corée du Sud, certains avec des membres de la TCI et d'autres sans. Il est très encourageant de voir qu'un si grand nombre d'organisations se sont constituées aussi rapidement, mais nous ne nous faisons pas d'illusions en prétendant contribuer à une réelle intervention politique internationale. Comme nous l'avons écrit dans notre appel initial, il est raisonnable d’adopter une vision à plus long terme :

Il est inévitable que dans ce processus, certains travailleurs en viennent à reconnaître de façon minoritaire l'impasse dans laquelle le capitalisme précipite la société. Il est impératif que ces derniers s'organisent politiquement à un niveau international afin d'offrir une voie claire pour l'avenir. Cela ne se produira pas immédiatement, surtout pas après des décennies de recul des luttes des travailleurs face à l'offensive capitaliste. Cependant, la situation actuelle en Ukraine est un avertissement de ce que les gouvernements réservent aux travailleurs partout dans le monde et nous devons réagir, non seulement à l'exploitation quotidienne, mais aussi aux plans politiques de « nos » dirigeants.
Dans la situation actuelle de désastre humanitaire, nous n'avons pas d'illusion sur la possibilité qu'un mouvement de classe puisse surgir bientôt, même si l'histoire a maintenant pris un nouveau tournant désespéré. Nous devons construire ensemble quelque chose qui s'oppose à la fois à l'exploitation et à la guerre. Même si la crise actuelle en Ukraine se termine par un accord de fortune, cela ne peut que semer les graines pour le prochain cycle de conflits impérialistes.(6)

Nous étions également conscients que toute nouvelle initiative de notre part comporte le risque d’erreur et d’échecs. Le premier problème est venu du faux internationalisme de divers opportunistes de la gauche capitaliste (staliniens, maoïstes, trotskistes, etc.) qui ont utilisé dans leurs documents, images ou slogans le mot d’ordre NWBCW, en le vidant de tout contenu internationaliste.(7) Ils exploitent et détournent un slogan, en travestissant leur véritable politique qui est de soutenir « l'impérialisme secondaire » des « peuples opprimés » (en d’autres termes, les luttes nationalistes) ou de tout État opposé aux États-Unis. Or il n'y a pas de nation ou de lutte nationale que la classe ouvrière puisse soutenir aujourd'hui.

Le deuxième problème concerne ceux qui ont adhéré au NWBCW sans comprendre de quoi il s'agissait réellement ou plutôt, qui l'ont considéré comme l'extension de leur activité réformiste radicale antérieure. C'est ce qui s'est passé à Portland et à Rome,(8) où certains éléments ont vu dans NWBCW un moyen de mobiliser immédiatement une classe qui se remettait à peine de quatre décennies de recul et qui commençait à peine à trouver ses marques dans la lutte contre l'inflation. Leur perspective immédiate et ultra-activiste a conduit à la disparition de ces comités.

NWBCW n'a rien à voir non plus avec les groupes d'usine organisés par le Parti communiste internationaliste (PCInt) dans les années 1940. Ces groupes étaient, et sont toujours, des organisations composées de membres et de proches sympathisants du PCInt. Ils étaient à l'origine appelés « groupes syndicaux d'usine » parce qu'ils étaient conçus pour lutter politiquement à l'intérieur des syndicats qui, à cette époque, avaient été intégrés dans l'appareil d'État pour institutionnaliser la lutte salariale et la maintenir dans les limites de la légalité capitaliste. Les syndicats avaient alors cessé depuis longtemps d'être des « écoles du socialisme » (Marx) et étaient devenus des organes de cogestion avec les exploiteurs, toujours dans les limites légales utilisées par l'État pour restreindre tout mouvement de grève. Toute organisation économique permanente de la classe était donc condamnée à devenir un simple bras armé au bénéfice du statu quo existant (et c'est pourquoi les syndicats de base finissent également par emprunter la même voie). Cependant, des millions de travailleurs y étaient inscrits et cela ne pouvait être ignoré. La solution consistait à s'opposer politiquement et organisationnellement à ces organes dans l'usine. Ils sont ainsi devenus les armes du PCInt dans la lutte. Il ne s'agissait pas d'une tentative d'organisation de la classe, mais d'une tentative d'organisation des communistes dans la classe, en opposition au pouvoir des syndicats. Plus tard, dans les années 1980, la restructuration de l'industrie et la nouvelle composition de la classe ont conduit à l'idée que les travailleurs de différents lieux de travail se réunissaient dans des groupes « territoriaux » où la possibilité d'organisation était plus grande.

Mais il s'agissait, et il s'agit toujours, d'outils du PCInt (et par extension de la TCI). NWBCW n'appartient pas à la même catégorie, car il ne se limite pas aux membres de la TCI, mais tente de rassembler des internationalistes de différentes traditions pour construire un réseau international de comités afin d'organiser et de faire de la propagande contre les effets de la crise capitaliste sous tous ses aspects. Sa tâche est donc de relier la baisse actuelle du niveau de vie à la menace future d'une guerre plus générale. NWBCW sera confrontée à des problèmes pratiques (et comme nous l'avons noté, elle en a déjà rencontré dans certains endroits) et des groupes se formeront et disparaîtront, mais notre engagement en tant qu'internationalistes à l'égard de cette perspective à long terme ne changera pas. Comme nous l'avons déjà dit à maintes reprises, NWBCW ne prendra forme que dans le cadre d'un mouvement de classe plus large.

Les comités NWBCW ne sont pas non plus de simples groupes de lutte puisque ces derniers sont issus de luttes particulières sur le lieu de travail, créés dans la lutte et pour la lutte, ouverts à tous. Ils ne sont pas créés d'en haut, ils n'ont pas de carte de membre, pas de programme, ni même une liste de points d'accord fondamentaux (comme ceux des comités NWBCW. Ils sont ouverts à tous les travailleurs et à tous ceux qui veulent prendre part à la lutte. Ils sont comme les autres organes unitaires de la classe tels que les réunions de masse, les comités de grève, les conseils ouvriers, etc. Ce sont des organes au sein desquels ceux qui cherchent à dénoncer le système capitaliste doivent se battre, afin d'élargir la base de la lutte.

L'un des problèmes des luttes ouvrières actuelles est qu'elles sont dispersées et éclatés entre les différents secteurs. Le NWBCW peut offrir un objectif à plus long terme en se concentrant sur la situation globale dans laquelle le capitalisme nous emmène. La NWBCW est une tentative de construire une initiative plus large (tant que nous sommes encore libres de le faire) dans le sens où elle tend la main à d'autres internationalistes pour construire un réseau en prévision de luttes plus larges à venir. NWBCW n’aura pas de réalité si ces luttes ne se concrétisent pas davantage.

Le NWBCW est donc ouvertement politique et certains camarades l'ont comparé à l'esprit anti-guerre et anti-capitaliste de la Gauche de Zimmerwald de 1915. Il est vrai qu’une fraction de gauche s’était regroupée en réaction au Manifeste de Zimmerwald qui ne mentionnait pas que la lutte contre la guerre était aussi une lutte contre le système qui engendrait les guerres impérialistes. Nous pouvons donc dire que le NWBCW partage cet aspect de la Gauche de Zimmerwald (qui deviendra plus tard la base de la fondation de la Troisième Internationale en 1919). Cependant, nous ne devons pas pousser cette comparaison historique trop loin, car le contexte dans lequel nous opérons est très différent de celui de nos ancêtres à Zimmerwald il y a plus d'un siècle. À l'époque, la Première Guerre mondiale durait depuis près d'un an lorsque les socialistes se sont réunis à Zimmerwald. Ils tentaient de surmonter la débâcle causée par la trahison des dirigeants des partis sociaux-démocrates de la Deuxième Internationale, qui avaient largement soutenu leurs « propres » gouvernements. Seuls les partis russe, polonais, bulgare et serbe appelant à une opposition révolutionnaire à la guerre. Cette trahison a été d'autant plus massive que la Deuxième Internationale regroupait à l'époque des millions de travailleurs à travers le monde et qu'elle avait adopté, résolution après résolution, une position appelant à combattre la guerre impérialiste. Aujourd'hui, notre tâche n'est pas de ranimer un mouvement désorienté, mais de transmettre une position anti-guerre ancienne et éprouvée, propre à la classe ouvrière, à tout nouveau mouvement qui surgirait.

Il est clair que tous les internationalistes ne comprennent pas encore la gravité de la voie dans laquelle le capitalisme s'est engagé et restent bloqués dans les polémiques du passé. En conséquence, ils ont profondément mal compris ce que représente NWBCW. Nous ne doutons pas de leur sincérité en tant qu'internationalistes et ne répondrons donc pas à leurs polémiques, qui sont les mêmes que celles que nous avons entendues si souvent. Il y a des questions sur lesquelles nous devons accepter d'être en désaccord si nous voulons forger un véritable mouvement anticapitaliste pour l'avenir, et faire confiance à la réalité matérielle qui rassemble les révolutionnaires face à un système de plus en plus désespéré.

Ajoutons que NWBCW n’a pas pour objet la création d’une quelconque nouvelle organisation. Il ne suppose pas un accord politique total, mais une collaboration sur la base d’une position internationaliste selon les cinq points énumérés ci-dessus : aucun État quel qu'il soit ne peut être soutenu, qu'il s'agisse d'une grande puissance impérialiste ou d'un pays impérialiste en devenir, car ils se battent tous pour un enjeu national dans l'ordre capitaliste mondial. Nous espérons évidemment que la participation à un mouvement positif avec un objectif clair stimulera la discussion politique et encouragera les échanges, qui élargissent et approfondissent le mouvement, mais la question du regroupement politique dans une future internationale ne se posera que lorsqu'un véritable mouvement de classe aura démarré, ce qui n’est pas d’actualité Seul un mouvement de classe plus large posera de nouveaux défis aux révolutionnaires et rendra obsolètes les différences du passé - ce qui ouvrira alors potentiellement la voie à un processus politique plus fructueux qui verra les internationalistes travailler à la création d'une organisation internationale cohérente capable de fournir une orientation programmatique dans la guerre de classe contre un système obsolète. Il ne s'agit donc pas seulement d'une initiative pour ici et maintenant, mais d'une orientation pour toute la période à venir.

Pour la TCI, NWBCW fait dans un sens partie de notre tradition. Il s'inscrit dans le droit fil de « l'Appel pour un front prolétarien uni » que le PCInt a lancé en 1944.(9) Il était ouvert à toutes les « formations politiques prolétariennes et sans parti » qui acceptaient la position internationaliste d’opposition aux deux camps de la Seconde Guerre mondiale. Il se terminait par deux orientations fondamentales en matière d'organisation :

  1. Sur la base de ces positions, les travailleurs (peu importe l'étiquette politique qu'ils utilisent) peuvent diffuser l'appel de notre parti et, après avoir débattu, clarifié et accepté les idées qui le justifient, être les initiateurs des premiers contacts et des premiers regroupements organiques sur le lieu de travail. Après tout, les travailleurs ont clairement démontré qu'ils sont désormais maîtres dans l'art de s'organiser en défiant les patrons et leurs serviteurs fascistes. Le front unique ouvrier rassemble et cimente les forces destinées à lutter sur les barricades de classe contre la guerre et ses forces politiques dirigeantes, tant fascistes que démocratiques.
  2. Sa tâche la plus importante et la plus urgente est d'empêcher que les travailleurs soient démoralisés par la propagande de guerre, de démasquer les agents impérialistes déguisés en révolutionnaires, et d'empêcher que l'esprit de lutte et de sacrifice qui anime le prolétariat soit exploité aux fins de la guerre et de sa poursuite, même sous la bannière de la liberté démocratique.

Aujourd'hui, NWBCW implique le même appel à tous les internationalistes authentiques qui peuvent accepter les cinq positions de base (citées en début d’article) pour qu'ils créent leurs propres comités, ou rejoignent ceux qui existent déjà, afin que nous puissions construire une lutte contre toutes les menaces que l’involution du capitalisme fait peser sur notre existence.

Bureau international de la TCI
Mai 2023

Addendum de Bilan & Perspectives

Le texte précédent exposant un bilan provisoire des comités NWBCW, il convient d’y ajouter en conclusion quelques mots sur l’initiative en France. Une première réunion organisée conjointement par la TCI et le GIGC en décembre 2022 avait été l’occasion d’un débat animé. Nous avions noté cependant n’avoir « aucune illusion sur la réussite immédiate et le développement de ces Comités dans les mois qui viennent. Mais nous savons ne pas juger les choses au jour le jour et tomber dans l'immédiatisme ».(10)

De fait, il n’est pas apparu qu’une dynamique pouvait encore se matérialiser par une intervention commune et cohérente d’un comité NWBCW, celui-ci ne pouvant se réduire à une étiquette sans réelle consistante militante. Cette situation s’explique pour partie évidemment par le nombre limité et la dispersion des camarades ou sympathisants s’identifiant aux positions internationalistes. Celles-ci se sont exprimées néanmoins dans diverses prises de positions, tracts et publications(11) ou bien encore dans la campagne de solidarité Olga Taratuta.(12)

Par ailleurs durant tout le début de l’année 2023, l’actualité a été marquée par les grèves et manifestations sur la réforme des retraites dans lesquelles les enjeux globaux de la crise capitaliste et de la marche à la guerre ont été absents. Il était dans l’intérêt des forces politiques de « gauche » de circonscrire les enjeux de la lutte sociale sur le seul terrain de la réforme des retraites. Obscurcissant la nature des enjeux en cause, elle pouvait ainsi se poser en solution de rechange pour canaliser une colère dirigée par elle contre le gouvernement en place. Mais elles sont également des agents actifs de la campagne pro-guerre et contribuent, en Europe, au réalignement en cours. On voit ainsi en Allemagne les Verts apporter leur soutien à l’augmentation spectaculaire des crédits militaires décidée par le chancelier Olaf Scholz, tandis qu’en France LFI affirme : « Tant humanitaire que militaire, l’aide à l’Ukraine face à l’agression criminelle de la Russie est indispensable ».(13)

En dehors du contexte économique marqué par l’inflation galopante, la guerre et l’implication de l’État français dans celle-ci n’ont pas eu de conséquences directes trop évidentes aux yeux de l’opinion. La fiction selon laquelle ce conflit serait limitée à un affrontement local a pu se maintenir.

Pour sa part, B&P est intervenu durant cette période en pointant le lien entre la dégradation des conditions d’existence du prolétariat et la guerre, porteuse d’une dynamique de généralisation. Face à celle-ci, la seule réponse conséquente consistera pour le prolétariat à élever sa combativité et à faire reculer l’embrigadement moral et, demain, humain que la bourgeoisie exigera de lui. Cet effort étant inséparable de l’intervention en son sein des internationalistes, nous appelons tous ceux qui se retrouvent en accord sur le fond avec nous à nous faire parvenir leurs commentaires et contributions. En dehors de tout projet artificiel ou volontariste, il nous paraît toujours plus indispensable que s’élève notre capacité d’intervention collective.

B&P
Juillet 2023

Notes :

(1) leftcom.org

(2) Voir entre autres : leftcom.org et leftcom.org

(3) leftcom.org

(4) leftcom.org

(5) leftcom.org

(6) leftcom.org

(7) Un exemple classique, bien que plus sophistiqué, est celui de l'Italie : pungolorosso.wordpress.com. Mais en Grande-Bretagne, la YCL stalinienne l'utilise aussi parfois, même si sa position est entièrement pacifiste et ne lie pas la lutte contre la guerre à la lutte contre le capitalisme (tout en évitant de critiquer l'impérialisme russe) : ycl.org.uk

(8) leftcom.org

(9) archivesautonomies.org

(10) leftcom.org

(11) igcl.org

(12) nowar.solidarite.online. Nous saluons cette campagne, sans nécessairement être en accord avec tous ses aspects, qui démontre l’existence d’actes de refus de la guerre dans les deux camps impliqués.

(13) lafranceinsoumise.fr

Thursday, July 27, 2023