Après l'attaque éclair du groupe anti-terroriste français, il ne fait aucun doute que le meurtre choquant et barbare à l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, de 12 personnes ainsi que quatre autres dans un supermarché casher, soit l'œuvre de militants djihadistes. Déjà en développement, les mouvements nationalistes et racistes d’esprit étroit à travers l’Europe et le monde,ont bénéficié d'un énorme coup de propagande. C'est précisément ce que les tueurs espéraient. S'ils pouvaient provoquer une réaction encore plus forte contre les musulmans avec une plus grande discrimination et répression, cela fournirait à leur petite minorité les moyens d'obtenir potentiellement plus de recrues. Cela conduira à des incidents toujours plus horribles et à un racisme encore plus violent. C'est la guerre qu'ils veulent. L'inutile faiblesse du terrorisme s'épanouit justement dans ce contexte de brutalité et d'inhumanité sans fin.

Pour la plupart des 1,9 milliard de musulmans dans le monde, les actions de quelques salafistes (les djihadistes salafistes possèdent moins de 10 millions de sympathisants dans le monde) sont une abomination. Et si les salafistes proclament que le Prophète est leur inspiration, la véritable cause de leurs attaques possède d'autres racines matérielles. Ce n'est pas un hasard si ce djihadisme a prospéré après l'invasion de l'Afghanistan et celle de l'Irak. C'est un accident que l'impérialisme occidental a créé. Pendant la guerre froide, le régime Reagan a fourni des armes aux moudjahidins tandis que ses alliés saoudiens ont mis en place des madrassas au Pakistan. Les étudiants (talibans) de ces madrassas sont alors devenus les Talibans qui ont finalement conquis Kaboul tandis qu'au dehors les moudjahidins se sont développés avec Al-Qaïda. Lorsque Saddam Hussein a envahi le Koweït, le régime saoudien a permis aux États-Unis de construire des bases en " terre sainte " ce qui a enragé Al-Qaïda. Le 9 septembre avec tous ses aspects tragiques et ses implications a conduit à l'invasion impérialiste ultérieure de l'Irak et de l'Afghanistan. Uniquement en Irak les États-Unis et ses alliés ont lancé plus de bombes que dans les deux guerres mondiales réunies. 200 000 Irakiens sont morts uniquement à la suite de l'invasion. Comparé aux millions d'innocents qui sont morts dans ces pays, le meurtre à Charlie Hebdo reste modeste. Le vrai problème demeure que l'arrogance impérialiste est le terrain fertile pour le djihadisme et la lutte contre l'Ouest corrompu et corrupteur. Cela a pris la forme d'un islam basé sur des sectes sunnites qui appellent même à l'assassinat d'autres musulmans et au viol de leurs épouses et de leurs filles afin de créer un califat qui, au nom d'Allah, préservera le pétrole et ses revenus financiers. L'État islamique dirigé par Abu Bakr al Baghdadi est la dernière émanation de cette culture qui au-delà de ses prétentions religieuses perpétue la barbarie capitaliste sous ses pires formes.

Mais ce n'est pas uniquement les actions impérialistes qui ont déclenché les meurtres à Charlie Hebdo. C'est aussi la crise capitaliste mondiale. En, effet, le chômage, la discrimination et la dévastation que l'impérialisme occidental a apporté au Moyen-Orient et en Asie est amplifié par l'humiliation et le désespoir des jeunes qui ne peuvent ni trouver un emploi ni une existence normale dans les pays capitalistes avancés. Si l'on ajoute à cela le harcèlement raciste dans certains endroits comme dans la banlieue de Paris, l'on a le terreau pour des actions désespérées. Marine Le Pen dans sa médiocrité populiste et raciste a appelé à la restauration de la peine de mort. Elle ne se rend pas compte que, pour ces jeunes la vie est déjà sans valeur et que le martyre leur donne au moins un sens.

Toutefois, ces meurtres ont déjà été un cadeau à la propagande des «États démocratiques" partout dans le monde. Le gouvernement français a habilement transformé les meurtres pour la défense de «l_a liberté d'expression et de la démocratie_ ». Les "Je suis Charlie" des manifestants chantant la Marseillaise se sont enveloppés dans la défense des valeurs patriotiques de la république française (au grand dam du Front national). Les dirigeants du monde d'Obama à Poutine ont tous eu hâte de sauter dans le train de la défense de "nos valeurs démocratiques".

Alors, oubliez la crise économique qui a fait baisser vos niveaux de vie. Oubliez les contrats à zéro heure, les travaux occasionnels à temps partiel et la nature précaire de votre travail. Oubliez le déclin de l'État providence et du système des soins de santé. Rejoignez le "front uni" (cf. : le Ministre de l'Intérieur français) pour la défense de la démocratie. Mais de quelle classe s’agit-il quand on parle de « valeurs démocratiques » ? Sans égalité économique, elles n’existent pas pour tout le monde. Dans un système basé sur le profit des banques et leur renflouement tandis que la classe ouvrière fait face à plus d'austérité pour les payer. Toutefois, encore plus d'austérité est à venir car nos capitalistes démocratiques n'ont pas de solution à leur crise économique. Ils continuent de parler de reprise, mais elle est seulement pour les riches.

Donc, ne tombez pas dans les pièges de ces sirènes, même si vous vous identifiez émotionnellement avec les morts. La seule façon d'échapper aux pièges jumeaux de la barbarie djihadiste et de l'impérialisme capitaliste est de se battre sur nos propres intérêts. Cela signifie ne pas accepter d'autres réductions de nos conditions de vie, de travail et d'exploitation croissante. Vous pouvez voter pour qui vous voulez, mais vous ne pourrez jamais voter afin de vous débarrasser du capitalisme : en tout cas, pas tant que les travailleurs et travailleuses du monde entier ne se seront pas levés-es pour renverser l'ordre existant. Les djihadistes, avec leur rêve de califat, n'ont pas de solution de rechange à offrir au-delà de la même vieille domination du capital sur le travail salarié, le système qui est à la racine de la crise d'aujourd'hui. La seule solution civilisée et pratique pour se débarrasser de l'injustice sociale du capitalisme reste pour la classe ouvrière mondiale de se lever et d'arracher les racines et les branches de ce système. Nous avons besoin d'un véritable mouvement anticapitaliste, avec un programme qui décrit un objectif plus attrayant et réaliste que des rêves de paradis sur terre. Ce but est une société libérée de l'inégalité sociale et de la privation économique; un véritable système de démocratie ouvrière basée sur l'élection directe de délégués révocables comme dans un monde sans argent, sans exploitation, sans classes et sans frontières nationales. C’est seulement en combattant pour cela que nous mettrons un terme à la guerre impérialiste et à ses ramifications comme le monstre djihadiste qu’il a créé en terre d’Islam.

Socialisme ou Barbarie

Il n'y a pas de troisième voie.

Prise de position de la Tendance Communiste Internationaliste 10 janvier 2015