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Introduction
La période actuelle
L’effondrement de l’Union Soviétique a mis fin à la guerre froide. Cet évènement n’a par contre pas mis fin à l’exploitation capitaliste, à l’impérialisme, et à la menace d’une guerre mondiale.
Au contraire, sa disparition est due à des causes fondamentales liées au fonctionnement du système capitaliste en tant que tel. La première cause est la crise de l’économie mondiale. Depuis le début des années 70, toutes les formes de capitalisme, qu’il soit d’État (se prétendant socialiste ou à économie planifiée) ou les soi-disant économies mixtes du "monde libre", ont dû faire face à une crise croissante de stagnation qui est due au fait que le capitalisme a atteint la fin de son cycle d’accumulation. Un des premiers signes fut la dévaluation du dollar en 1971, et l’effondrement de l’accord de Bretton Woods qui s’en suivit, lequel avait façonné l’ordre économique de l’impérialisme d’après-guerre. Ce fut une tentative de faire payer au reste du monde le ralentissement de la croissance américaine.
La deuxième cause est la stagnation de l’économie de l’Union Soviétique elle-même. Contrairement à ce que certains de ses partisans ont maintenu, l’Union Soviétique n’était pas le "socialisme réel" mais plutôt une forme particulière de capitalisme où l’État a assumé le rôle de la bourgeoisie classique. En vertu de son monopole sur le pouvoir d’État, le Parti communiste de l’Union Soviétique est en fait devenu le véhicule de la nouvelle classe dominante, qui s’est transmis les privilèges d’une génération à l’autre.
En outre, il faut ajouter la faiblesse relative de l’URSS. La stagnation, accompagnée d’un retard technologique par rapport aux États-Unis et dans le monde occidental a eu pour conséquence que la base économique, pour soutenir l’effort militaire, s’est affaiblie. Dans cette course sans précédent aux armements, durant les années 70 et 80, l’économie soviétique n’était en aucune façon capable d’égaler les dépenses de l’État américain. Les tentatives de Gorbatchev pour mettre fin à cette course et restructurer l’économie se heurtèrent au sabotage provenant de l’intérieur de la classe dominante, et de l’espace de manœuvre restreinte imposée par la crise qu’il essayait de résoudre. Tous ces facteurs contribuèrent à l’effondrement de l’URSS en 1991.
L’histoire de cette période confirme donc deux choses:
- Le plein contrôle par l’État de l’économie (i.e., la soi-disant économie planifiée) n’est en rien le socialisme. Dans une économie vraiment socialiste, les producteurs décideraient eux-mêmes collectivement de ce qu’ils devraient produire sur la base des besoins humains. La planification économique deviendrait une question d’administration rationnelle, impliquant l’attribution de la force de travail en accord avec les priorités de la société. Il n’y aurait pas de crise économique du genre vécue par l’ex-URSS.
- Aucune tentative par l’État capitaliste de supprimer ou de réguler sa propre loi de la valeur, et encore moins le rêve inatteignable de lui fournir une libre expression (la soi-disant loi du marché) ne pourra se débarrasser de la crise mondiale de l’économie capitaliste.
En dépit de toutes les tentatives pour gérer la crise économique; en dépit des accords entre les sept grandes puissances économiques mondiales et les suspensions de dettes internationales; en dépit de la révolution du microprocesseur et de la restructuration capitaliste amortie par des mesures de sécurité du revenu et de prestations d’assurance-chômage, le problème fondamental de l’accumulation capitaliste demeure. C’est la baisse chronique de la plus-value. Cette baisse force le capital à chercher toujours plus de moyens pour accroître l’exploitation de la classe ouvrière, tant en termes relatifs qu’absolus.
Situation générale et perspectives pour la classe ouvrière
Passons à l’examen des relations de classe aujourd’hui. Il y a une énorme disproportion entre la gravité de la crise économique et ses conséquences: la menace de la guerre impérialiste d’une part, et le faible niveau de riposte du prolétariat à la crise du système d’autre part. La domination réelle du capital sur la production et la distribution est devenue de plus en plus totale sur l’ensemble des relations sociales et politiques. L’idéologie bourgeoise a pénétré en profondeur la classe ouvrière par l’entremise des partis sociaux-démocrates et des syndicats. De ce fait, ils étouffent dès le départ les tentatives prolétariennes de résistance aux effets de la crise.
Les grèves survenues, quelques fois même dans un secteur entier de la production nationale, ne se sont jamais propagées parce que tout sens de la solidarité et de l’unité de classe ont été étranglés par le nationalisme, par l’individualisme, et par l’idée de changer les choses un secteur à la fois: en fait par ces expressions de l’idéologie bourgeoise que la gauche du capital a instillé parmi les travailleurs et les travailleuses. La domination du capitalisme sur la classe ouvrière, par l’entremise des syndicats et des partis de la gauche du capital, est la manifestation concrète de ce que Marx appelait la "réification des rapports sociaux". Quelles que furent leurs origines historiques, aujourd’hui ils ne sont que les instruments matériels du totalitarisme capitaliste; ils doivent être confrontés comme tels, et pas simplement dénoncés, autant sur le plan politique que sur le plan organisationnel.
En dépit des incontestables succès du capitalisme à contenir la lutte des classes, ses contradictions persistent. En tant que marxistes, nous savons qu’elles ne pourront être contenues éternellement. L’explosion de ces contradictions ne résultera pas nécessairement en une révolution victorieuse. Dans l’ère impérialiste, la guerre mondiale est le moyen par lequel le capital "contrôle" et dénoue ses contradictions.
Cependant, avant que cela n’arrive, il est possible que l’emprise politique et idéologique de la bourgeoisie sur la classe ouvrière puisse être rompue. En d’autres mots, des vagues de lutte de classes massives et soudaines peuvent se produire, et les révolutionnaires doivent s’y préparer en conséquence. Quand la classe reprendra à nouveau l’initiative, et commencera à utiliser sa force collective contre les attaques du capital, les organisations politiques révolutionnaires devront être en position de mener les batailles politiques et organisationnelles nécessaires contre les forces de la gauche bourgeoise.
Chaque vague de luttes successives sera une préparation pour la révolution seulement si le programme et l’organisation des révolutionnaires en ressortent plus forts, et uniquement lorsque le programme révolutionnaire (et l’organisation qui le soutient) peut, par la lutte elle-même, s’enraciner au sein de la classe ouvrière, ce qui est démontré par l’expérience historique du prolétariat.
La révolution russe de 1905 fut la préparation de 1917, dans le sens où le programme révolutionnaire qui mena à 1917 sortit renforcé des batailles précédentes. Aujourd’hui, il n’y a aucune garantie qu’il y ait un tel épisode de conflits généralisés et insurrectionnels qui, tout en résultant dans la défaite immédiate de la classe, renforcera aussi les forces révolutionnaires. Cependant, une chose est certaine, si un tel mouvement de masse survenait sans idées révolutionnaires prenant une forme politique et organisationnelle importante à l’intérieur de la classe ouvrière dans son ensemble, alors la défaite prendrait des proportions historiques. C’est pourquoi la tâche de l’organisation politique prolétarienne est de retourner à la classe ouvrière les leçons de sa propre expérience historique, afin qu’elles deviennent la force matérielle pour l’émancipation de notre classe.
Le Bureau International pour le Parti Révolutionnaire
Le Bureau International fut formé en 1983, résultat d’une initiative conjointe du Partito Comunista Internazionalista (P.C.Int.) d’Italie et de la Communist Workers Organisation (C.W.O.) du Royaume-Uni. Il y avait deux raisons principales à la base de cette initiative.
La première était de donner une forme organisationnelle à une tendance déjà existante au sein du camp politique prolétarien. Voici ce qui est ressorti des Conférences Internationales convoquées par Battaglia Comunista (1) entre 1977 et 1981.
La base d’adhésion à la dernière de ces conférences fut les sept points votés par la C.W.O. et le P.C.Int. à la Troisième Conférence:
- Reconnaissance que la Révolution d’Octobre fut une révolution prolétarienne.
- Reconnaissance de la rupture avec la social-démocratie mise de l’avant par les deux premiers congrès de la Troisième Internationale.
- Rejet sans réserve du capitalisme d’État et de l’autogestion.
- Rejet des partis socialistes et communistes en tant que partis bourgeois.
- Rejet de toutes les politiques qui assujettissent le prolétariat à la bourgeoisie nationale.
- Une orientation vers l’organisation des révolutionnaires, qui reconnaît que la doctrine et la méthodologie marxistes représentent la science prolétarienne.
- Reconnaissance des rencontres internationales en tant que constituantes du travail de débat parmi les groupes révolutionnaires pour la coordination de leur intervention politique active en direction de la classe dans ses luttes, et dans le but de contribuer au processus menant à la constitution du Parti International du Prolétariat, indispensable organe politique de direction du mouvement de classe révolutionnaire et du pouvoir prolétarien lui-même.
La seconde raison était la volonté d’agir en tant que pôle de référence pour les individus et les organisations qui re-émergeaient sur la scène internationale au fur et à mesure que la crise aggravée du capitalisme provoquait une réponse politique. En tout état de cause, on ne peut pas dire que la première décennie de l’existence du Bureau a été marquée par la reprise d’une lutte de classe massive. Tout au contraire, comme nous l’avons dit, la riposte ouvrière aux attaques croissantes du capital a été pour l’essentiel limitée à des conflits militants, mais sectoriels (comme la grève des mineurs britanniques de 84-85, ou la lutte en cours des débardeurs espagnols), et dont le résultat fut une défaite. Le capital international a donc bénéficié d’un moment de répit grâce auquel il a pu se restructurer au détriment du gagne-pain de millions de travailleurs et de travailleuses; par la multiplication des mesures d’austérité, l’aggravation des conditions de travail et des termes de la vente de la force de travail.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant qu’on ait vu relativement peu de nouveaux venus aux positions politiques prolétariennes lors des années 80. Plusieurs de ceux qui se sont manifestés ont plus tard disparu à mesure que l’isolement politique les terrassait. Néanmoins, malgré la situation objective défavorable et la modestie de nos forces, l’existence organisationnelle du Bureau s’est consolidée. Tout en partageant la responsabilité de la correspondance mondiale; et lorsque cela fut possible, en organisant des rencontres et des discussions directes avec les éléments politiques avec lesquels nous étions entrés en contact, le BIPR a publié plusieurs déclarations internationales et les a distribuées dans diverses langues lors d’évènements cruciaux au cours des dernières années.
Enfin, nous avons expliqué que le Bureau existe en tant que tendance spécifique et identifiable au sein du large camp prolétarien. On peut définir ce dernier brièvement comme étant constitué de ceux et de celles qui soutiennent l’autonomie de classe prolétarienne face au capital, qui rejettent le capitalisme sous toutes ses formes, et qui n’ont jamais considéré le stalinisme et l’ex-URSS comme étant socialistes, tout en reconnaissant qu’Octobre 1917 fut le point de départ de ce qui aurait pu devenir une révolution mondiale plus importante. Parmi les organisations que nous incluons dans ce cadre, il reste des différences politiques significatives, dont la question épineuse de la nature et de la fonction de l’organisation révolutionnaire. Le cadre politique du BIPR est le suivant:
- La révolution prolétarienne sera internationale ou ne sera pas. La révolution internationale présuppose l'existence d'un parti international représentant l’expression politique concrète de la partie du prolétariat possédant la conscience de classe la plus avancée, et qui s’organise collectivement afin de lutter pour le programme révolutionnaire au sein du reste de la classe. L’histoire a démontré que les tentatives en vue de former le parti pendant le déroulement même de la révolution furent trop peu trop tard.
- Le BIPR a donc comme objectif la création du parti communiste mondial dès que le programme politique et les forces internationales le permettront. Cependant, le Bureau est pour le parti mais il ne prétend pas être son seul noyau préexistant. Le futur parti ne sera pas la simple expansion d’une seule organisation.
- Avant que le parti mondial ne puisse être formé, les détails précis du programme révolutionnaire devront être clarifiés dans tous ses aspects via la discussion et le débat parmi ses parties constituantes potentielles.
- Les organisations, qui en viendront éventuellement à former le parti mondial, doivent déjà avoir une existence significative à l’intérieur de la classe ouvrière dans les régions d’où elles proviennent. La proclamation du parti international (ou de son noyau initial) uniquement sur la base de l’existence de groupes propagandistes ne constituerait en rien un pas en avant pour le mouvement révolutionnaire.
- L’organisation révolutionnaire doit s’évertuer à dépasser l’état d’un simple réseau de propagande. Malgré les opportunités limitées, la tâche des organisations prolétariennes d’aujourd’hui est de travailler à s’établir en tant que force révolutionnaire au sein de la classe ouvrière; cela dans le but d’être en position de montrer la voie à suivre dans la lutte des classes en vue d’organiser et de diriger les luttes révolutionnaires de demain.
- La leçon que l'on doit tirer de la dernière vague révolutionnaire n'est pas que la classe ouvrière puisse se passer d'une direction organisée, ni que le parti est la classe (selon les abstractions métaphysiques des bordiguistes). Plutôt, la direction et sa forme organisationnelle (le parti) sont les armes les plus importantes de la classe ouvrière révolutionnaire. Sa tâche sera de se battre pour une perspective communiste dans les organes de masse du pouvoir prolétarien (les soviets ou conseils). Cependant, le parti demeurera une minorité de la classe ouvrière et il n’est pas le substitut de la classe en général. La tâche d’édifier le socialisme appartient à la classe ouvrière dans son ensemble. C’est une tâche qui ne peut être déléguée, même pas à l’avant-garde la plus consciente de la classe.
Plateforme du Bureau Internationale pour le Parti Révolutionnaire
Le Capitalisme
Comme dans toutes les sociétés de classe, le mode de production capitaliste souffre de la contradiction entre les rapports et les forces de production. Sous le capitalisme, la force de travail (le prolétariat) existe en tant que marchandise vendue par ses propriétaires en retour d’un salaire équivalant à la valeur des biens requis pour maintenir l’existence, et assurer la reproduction, de la force de travail elle-même. En terme de classe, cela s’exprime dans la contradiction entre la bourgeoisie (ceux qui possèdent et qui contrôlent les moyens de production) et le prolétariat (ceux qui dépensent leur force de travail avec les moyens de production). Le travail est la source de toute valeur. Seule la force de travail peut transformer des matières premières en marchandises. Toutes les marchandises ont à la fois une valeur d’usage et une valeur d’échange. Les capitalistes ne sont intéressés dans la première forme de la valeur que dans la mesure où elles peuvent être vendues afin d’acquérir la seconde pour l’acheteur. C’est cet échange de valeur capitalisée, tel que représenté par la plus-value produite par la force de travail des prolétaires, qui est la source des profits pour le capitalisme. La tendance du capital d’extorquer de plus en plus de plus-value provenant de la force de travail, est la base de la lutte des classes entre bourgeois et prolétaires, entre le capitalisme et la classe ouvrière. Cela reste tout aussi vrai aujourd’hui, dans les soi-disant sociétés post-industrielles - alors que les porte-parole de la bourgeoisie nous affirment que la classe ouvrière a disparu - que ce l’était au siècle dernier lorsqu’une nouvelle catégorie d’économistes bourgeois niait que la force de travail était la source de la richesse. Les contradictions fondamentales de classes demeurent, indépendamment des changements technologiques qui ont eu lieu sous le capitalisme.
Les différentes formes du capitalisme
L’antagonisme fondamental entre la nature sociale du travail et la possession restreinte de la propriété demeure, indépendamment de la forme légale précise de la propriété bourgeoise des moyens de production d’une part, et les formes changeantes du caractère social du travail salarié d’autre part. La propriété d’État des plus importants moyens de production n’a pas altéré leur nature capitaliste en tant que propriété du capital financier, laquelle est la forme réelle du capital à l’époque impérialiste. De même, la prédominance de monopoles nationaux et multinationaux dans la forme de société par actions (agissant en tant que capital "social") ne signifie pas la fin des contradictions de base du capitalisme, mais plutôt leur exacerbation et leur extension en leur donnant une dimension internationale. C’est ce qu’Engels reconnaissait il y a longtemps lorsqu’il expliquait que:
... ni la transformation en société par actions, ni la transformation en propriété d’État ne suppriment la qualité de capital des forces productives. Pour les sociétés par actions (et les trusts), cela est évident. Et l’État moderne n’est à son tour que l’organisation que la société bourgeoise se donne pour maintenir les conditions extérieures générales du mode de production capitaliste contre des empiètements venant des ouvriers comme des capitalistes isolés. L’État moderne, quelle qu’en soit la forme, est une machine essentiellement capitaliste: l’État des capitalistes, le capitalisme collectif en idée. Plus il fait passer de forces productives dans sa propriété, plus il devient capitaliste collectif en fait, plus il exploite de citoyens. Les ouvriers restent des salariés, des prolétaires. Le rapport capitaliste n’est pas supprimé, il est au contraire poussé à son comble.
L’Anti-Dühring
Ainsi, ces pays dont on nous disait il n’y a pas si longtemps qu’ils étaient socialistes n’étaient en fait rien de plus qu’une forme particulière de capitalisme d’État: où l’État contrôlait directement les moyens matériels de production et détenait le monopole du marché. L’effondrement misérable de l’URSS ne fait que confirmer cette analyse développée par la Gauche communiste (fondée sur la critique de l’économie politique, le marxisme) durant les longues années qui séparent la Révolution d’Octobre de l’écroulement du bloc russe. L’amalgame tragique entre propriété d’État et socialisme a pris fin maintenant que la prétendue société soviétique est revenue aux formes légales et organisationnelles du capitalisme classique (i.e. occidental).
L’impérialisme
L’ancienne Union soviétique et les États alignés sur elle formaient un bloc impérialiste. L’effondrement de ce bloc a ouvert un nouveau chapitre dans l’histoire du capitalisme mondial, mais c’est un chapitre qui fait partie de l’histoire de l’impérialisme capitaliste. La Première Guerre mondiale, produit d’une compétition entre les États capitalistes, a marqué un tournant définitif dans le développement du capitalisme. Elle a démontré que le processus de concentration et de centralisation du capital avait atteint de telles proportions que désormais les crises cycliques, qui avaient toujours été une composante intrinsèque du processus d’accumulation du capital, seraient des crises globales se résolvant uniquement par une guerre mondiale. En bref, cela confirma que le capitalisme était entré dans une nouvelle ère historique, l’ère de l’impérialisme où tout État fait partie d’une économie capitaliste globale et ne peut échapper aux lois qui la gouvernent. L’impérialisme n’est donc pas simplement la politique des puissances capitalistes les plus fortes imposée aux plus faibles, c’est le processus incontournable par lequel les tentacules financiers et industriels des centres capitalistes hautement développés absorbent la plus-value provenant des régions périphériques. Ce processus ne reconnaît aucune frontière d’État et n’accorde aucune loyauté nationale aux bourgeoisies locales des zones périphériques. Ces dernières font partie de la classe capitaliste internationale et sont tout aussi empêtrées dans les machinations du capital financier international que la bourgeoisie des métropoles capitalistes traditionnelles.
L’ouverture de l’époque impérialiste du capitalisme, avec son cycle infernal de guerre mondiale - reconstruction - crise, inscrit aussi la possibilité d’une plus haute forme de civilisation (le communisme) à l’agenda de l’histoire. Elle fut confirmée de façon dramatique, en Octobre 1917, lorsque le prolétariat russe s’empara du pouvoir en tant que premier acte de la vague révolutionnaire européenne et mondiale qui émergea des effusions de sang et des dévastations produites par la Première Guerre mondiale. Cependant, l’expérience de cette période a confirmé de façon non moins dramatique, la banqueroute de la majorité des vieux partis de la Seconde Internationale qui, non seulement justifièrent le massacre mutuel des prolétaires, lorsqu’ils soutinrent leurs ‘propres’ États nations au cours de la guerre impérialiste, mais firent aussi de leur mieux pour supprimer la révolution au nom du socialisme pendant les débordements insurrectionnels qui suivirent la Guerre. Ainsi, on peut voir aujourd’hui qu’il y a une différence marquée entre les organisations politiques prolétariennes de la période d’avant Octobre et celles de la période postérieure. Durant la montée et la consolidation du capitalisme en tant que mode de production dominant, les mouvements nationalistes bourgeois ou anti-despotiques ont fourni le cadre pour la mobilisation des masses de prolétaires européens qui à leur tour ont facilité la formation de vastes syndicats et d’organisations de partis. À l’intérieur de ces organes, la classe ouvrière était en mesure d’exprimer son identité de classe séparée, et ce, en mettant de l’avant ses propres exigences, quoique dans le cadre des rapports sociaux bourgeois et politiques existants. Au même moment où les théories révolutionnaires de Marx et Engels furent reconnues et devinrent une composante permanente de la vie politique prolétarienne, même si les principales forces sociales démocratiques n’agirent jamais selon les préceptes politiques du marxisme. Pour les partis socialistes, la révolution que Marx avait entrevue est demeurée un objectif distant qui pourrait un jour être atteint, dans le futur, par des moyens non spécifiés. Le socialisme est resté ‘le futur glorieux’ pour lequel ils luttaient théoriquement, mais en pratique, l’objectif stratégique qui définissait leurs tactiques devint non pas l’assaut pour le pouvoir, mais de plus en plus pour les élections parlementaires, la journée de huit heures, la liberté d’organisation, etc.
Avec l’identification de la social-démocratie à l’impérialisme en 1914, le mouvement de la classe ouvrière atteint un tournant décisif. Cela résulta en la rupture complète des communistes, des forces dépassées du réformisme qui, à travers la Deuxième Internationale (1889-1914), avaient dominé le mouvement de masse. La fondation de la Troisième Internationale, proclamant l’ouverture de l’ère de la révolution prolétarienne mondiale, a signifié la victoire des principes originaux du marxisme. L’activité communiste est maintenant pointée uniquement sur le renversement de l’État capitaliste afin de créer les conditions pour la construction d’une nouvelle société.
Révolution et Contre-révolution
La défaite du mouvement révolutionnaire européen et la nature de la contre-révolution en Russie, ont posé des problèmes pour les marxistes révolutionnaires, alors qu’ils essayèrent de comprendre les leçons de toute l’expérience, de la période qui suivit la Deuxième Guerre mondiale. Le processus contre-révolutionnaire trouva écho dans la Troisième Internationale avec l’imposition de l’obligation, sur ses partis constitutifs, de défendre l’État russe, en même temps que la retraite de ces partis vers des stratégies et des tactiques sociales-démocrates. Ce processus de dégénérescence fut suivi par Trotski et ses partisans, avec leur politique d’entrisme à l’intérieur des partis sociaux-démocrates et travaillistes (le soi-disant "tournant français") durant les années 30, et le soutien du trotskisme aux ambitions impérialistes de l’URSS ce qui balaya le trotskisme en tant que courant révolutionnaire potentiel. Il laissa à d’autres le soin de tirer les leçons de la défaite. En dépit des positions prorusses des partis communistes stalinisés, et la dégénérescence sur le terrain du capitalisme d’État de la grande expérience bolchevique, les leçons tirées par la Gauche communiste, sur la nature capitaliste étatique et impérialiste de la Russie, ont empêché le programme communiste d’être complètement discrédité avec cette expérience. Cela signifiait que, même durant la Deuxième Guerre impérialiste, une force révolutionnaire pouvait émerger (le Parti Communiste Internationaliste a été formé en Italie en 1943).
L’expérience de la contre-révolution oblige aussi les révolutionnaires à approfondir leur compréhension des problèmes face aux relations entre l’État, le parti, et la classe. Alors que le rôle joué par l’ancien parti révolutionnaire dans la contre-révolution russe a mené plusieurs prétendus révolutionnaires à rejeter complètement l’idée même d’un parti de classe, la question n’est pas aussi simple. Le parti de classe est indispensable à la lutte révolutionnaire du prolétariat pour la simple raison qu’il est l’expression politique de la conscience de classe. Il contient la partie la plus politiquement avancée de la classe ouvrière, organisée pour défendre le programme d’émancipation du prolétariat tout entier. Par définition, le parti révolutionnaire sera toujours une minorité du prolétariat, et pourtant le programme communiste qu’il défend peut seulement être mis en application par la classe ouvrière dans son ensemble. Durant la révolution, le parti visera à prendre la direction politique en mettant de l’avant son programme dans les organes de masse de la classe ouvrière. Autant la conscience révolutionnaire sans un parti est impensable, la leçon de l’expérience russe est là pour montrer que même le parti de classe le plus conscient ne peut maintenir une révolution isolée des soviets (ou d’organes de masse similaires de la classe ouvrière). Les soviets (conseils) sont l’expression du pouvoir politique de la classe ouvrière (la dictature du prolétariat) et leur déclin et leur marginalisation de la vie politique russe furent le symbole de l’étranglement du jeune État soviétique par la contre-révolution capitaliste. Le pouvoir qui est resté aux mains des commissaires bolcheviques, à mesure qu’ils s’isolèrent d’une classe ouvrière épuisée et décimée, était le pouvoir d’un État capitaliste. Dans la future révolution mondiale, le parti international doit viser à diriger le mouvement de la classe exclusivement à travers des organes de classe de masse, qu’il encourage à voir le jour. Cependant, il n’y a aucune garantie formelle de victoire, et le parti révolutionnaire ne peut se restreindre à l’avance en érigeant des barrières mécaniques fondées sur la peur de la défaite. Ni le parti, ni les soviets ne sont une assurance en soi face à la contre-révolution. La seule garantie de victoire est la conscience de classe des masses ouvrières elles-mêmes.
Le parti révolutionnaire
Le parti de classe - ou les organisations politiques qui le précèdent - comprend la partie la plus consciente du prolétariat qui est organisée afin de défendre le programme pour l’émancipation de la classe ouvrière toute entière. En utilisant les instruments du marxisme, il tire les leçons politiques de l’expérience historique de la classe afin d’élaborer ce programme et de définir une stratégie et des tactiques conséquentes avec celui-ci. Le futur parti mondial aura la tâche de soutirer les masses de l’influence réactionnaire provenant des nombreuses divisions contre-révolutionnaires et des tendances nationalistes qui dominent la classe ouvrière. Lorsque les masses laborieuses - sous la pression des contradictions matérielles de la crise globale du capitalisme - apparaîtront une fois de plus sur la scène de l’histoire en collision avec leurs exploiteurs, le parti trouvera les conditions pour remplir pleinement ses principales tâches. Ceci, afin de gagner les masses au programme communiste et de conquérir la direction politique de la lutte afin de la mener vers le renversement révolutionnaire de l’État capitaliste. La révolution sera donc un succès seulement si l’organisation révolutionnaire - le parti communiste se tenant à la tête de la classe - est adéquatement développée et préparée pour son propre assaut frontal contre les ennemis politiques du programme révolutionnaire. Nous rejetons donc les schémas qui relèguent la naissance du parti au début de la révolution telle quelle, ou qui limitent ses tâches à la propagande et à simplement "prêcher" la révolution.
En dépit des responsabilités qui pèsent sur les forces politiques prolétariennes en vue de s’organiser immédiatement, les circonstances dans lesquelles elles se retrouvent imposent de sévères limites face à leur capacité d’influencer les larges masses. Au cours de l’époque impérialiste, la domination bourgeoise sur la société s’est raffinée et déployée, jusqu’à ce qu’elle ait englobé presque tous les aspects de la vie. Avec, les formes les plus extrêmes de concentration des moyens de production entre les mains du capital financier impérialiste, la domination politique et idéologique de la bourgeoisie est sans précédent. Ce que Marx a affirmé, il y’a plus d’un siècle, est plus vrai que jamais aujourd’hui:
Les idées de la classe dominante sont, à toute époque, les idées dominantes; en d’autres termes, la classe qui représente la puissance matérielle dominante de la société est en même temps la puissance spirituelle qui prédomine dans cette société. La classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose en même temps et par là même des moyens de production spirituelle, si bien que, en général, les idées de ceux à qui ces moyens font défaut, sont soumises à celles de la classe dominante. Les idées dominantes ne sont rien d’autre que l’expression idéologique des conditions matérielles dominantes, les conditions matérielles dominantes ayant pris la forme d’idées; l’expression des conditions qui font justement de cette classe la classe dominante, donc les idées de sa domination.
L’Idéologie allemande
Cela signifie qu’en situation de paix sociale, et spécialement dans les centres impérialistes où la domination bourgeoise est plus étendue et avancée, cela signifie que le prolétariat est assujetti au poids complet de l’idéologie et des organisations bourgeoises. En retour, cela impose une séparation marquée entre le prolétariat dans son ensemble, et son expression politique de lutte historique: le parti communiste. Ce sont les périodes de crises économiques et sociales qui peuvent aboutir à une rupture dans l’emprise idéologique et politique de la bourgeoisie. Jusqu’alors, le programme révolutionnaire et les organisations politiques représentées par celui-ci existeront seulement sous conditions de séparation forcée d’avec la classe. C’est une séparation qui ne peut être vaincue simplement par un acte de volonté ou par de simples moyens organisationnels.
Néanmoins, le cycle d’accumulation qui commença après la Deuxième Guerre mondiale tire à sa fin. Le boom d’après-guerre a depuis longtemps donné place à une crise économique globale. Encore une fois, la question de la guerre impérialiste, ou de la révolution prolétarienne est de nouveau à l’ordre du jour de l’histoire et impose aux révolutionnaires de par le monde la nécessité de re-serrer les rangs. En cette époque de monopole global du capitalisme, aucun pays ne peut échapper aux forces qui conduisent le capitalisme à la guerre. La progression inéluctable du capitalisme vers la guerre est exprimée aujourd’hui par l’attaque universelle sur les conditions de vie et de travail du prolétariat. Les conditions matérielles pour une lutte internationale du prolétariat contre ses exploiteurs existent donc. La nécessité et la possibilité d’une révolution communiste existent aussi.
Ce qui manque encore c’est un parti révolutionnaire qui soit capable de soutenir et de préparer un tel affrontement.
Principes directeurs de l’organisation
- L’époque historique où les luttes de libération nationale pouvaient représenter un élément de progrès dans le monde capitaliste s’est terminée avec la Première Guerre impérialiste en 1914. Le caractère global du capitalisme à l’époque impérialiste signifiat que l’apparente diversité des formations sociales dans le monde n’était pas le reflet d’une variété de divers modes de production. Ainsi, il n’y a pas lieu que le prolétariat adopte des stratégies d’action révolutionnaire distinctes dans les différentes parties du globe. Le travail de Marx avait déjà établi la distinction entre le mode de production et les formations sociales qui lui correspondent plus ou moins. L’expérience historique de la société de classe confirme que différentes formations sociales, produits de différentes histoires, peuvent exister sous le mode de production capitaliste mais qu’elles sont néanmoins toutes dominées par l’impérialisme, qui profite des différences nationales, ethniques, et culturelles pour maintenir sa propre existence. Tout comme les couches sociales et les traditions varient dans diverses régions et pays, les formes de domination politique de la bourgeoisie varient aussi. Cependant, dans tous les cas, le vrai pouvoir qu’elles représentent est toujours le même: le capitalisme. L’idée que la question nationale reste ouverte dans certaines régions du monde, et qu’en conséquence le prolétariat peut reléguer sa propre stratégie et ses tactiques à l’arrière-plan au profit d’une alliance avec la bourgeoisie nationale (ou pire avec l’un des fronts impérialistes), doit être absolument rejetée. C’est seulement lorsque le prolétariat s’unira pour défendre ses propres intérêts de classe que la base de toute oppression nationale sera ébranlée. Les organisations révolutionnaires rejettent toutes les tentatives qui nuisent à la solidarité de classe provenant des idéologies de séparation raciale ou culturelle.
- La nature universelle de la domination capitaliste exige une stratégie révolutionnaire universelle. La révolution prolétarienne et l’établissement de la dictature du prolétariat devront être les objectifs premiers du parti communiste dans chaque pays. Des différences dans des situations spécifiques, ou plus précisément la diversité des formes sociales et politiques de la domination bourgeoise à travers le monde, nécessitent diverses approches tactiques. Néanmoins, les tactiques de l’organisation internationale du prolétariat seront toujours définies sur la base de son programme révolutionnaire universel. Il y a longtemps que l’époque des luttes démocratiques a pris fin, et elles ne peuvent se répéter dans la présente époque impérialiste. Même si des revendications pour certaines libertés élémentaires peuvent être incluses dans l’agitation révolutionnaire, les tactiques du parti communiste visent le renversement de l’État et l’établissement de la dictature du prolétariat.
Les communistes n’entretiennent pas l’illusion sur le fait que la liberté des travailleurs et des travailleuses peut être gagnée par l’élection d’une majorité au Parlement. En premier lieu, c’est une illusion de "crétinisme parlementaire" (Marx) que de croire que la classe dominante nous observerait pacifiquement alors que nous légiférerions le socialisme. La démocratie parlementaire n’est que le camouflage qui masque la dictature de la bourgeoisie. Les vrais organes de pouvoir dans une société démocratique bourgeoise se retrouvent à l’extérieur du Parlement dans la bureaucratie d’État, les forces de sécurité et les détenteurs des moyens de production. Le Parlement est utile à la bourgeoisie parce qu’il donne l’illusion aux travailleurs et aux travailleuses de décider qui les gouvernera. C’est pourquoi les révolutionnaires s’opposent aux élections parlementaires et incitent les travailleurs et les travailleuses à se battre sur leur propre terrain de classe. C’est au parti révolutionnaire de démontrer que ce n’est que par la destruction du capitalisme, et de ses organes d’État, qu’il est possible à la classe ouvrière d’assurer l’entière liberté d’expression et d’organisation. - Les syndicats sont apparus en tant que négociateurs des termes de la vente de la force de travail des prolétaires. Ils sont les organes de médiation entre le capital et le travail. Ils ne sont pas, et n’ont jamais été, des instruments utiles pour le renversement de l’État bourgeois. À l’époque impérialiste, les syndicats, sans égard à leur composition sociale, sont des organisations qui travaillent à la préservation du capitalisme, tout particulièrement dans les moments cruciaux où celui-ci est menacé. Il découle de cela qu’il est impossible pour les révolutionnaires de conquérir les syndicats ou les transformer en organes de la révolution. Partout, la révolution prolétarienne devra combattre les syndicats car ils seront des bastions de la contre-révolution.
L’expérience de la dernière vague révolutionnaire, et de la contre-révolution qui l’a suivie, a rendu absolument clair aux marxistes révolutionnaires que le syndicat n’est pas, ni ne peut devenir, l’organe de lutte de masse dans lequel la minorité politique de la classe (le parti) travaille à transmettre son programme et ses slogans à la classe dans son ensemble. De tels organes de masse, que la théorie marxiste a traditionnellement vu comme étant à la fois des organes de lutte et de pouvoir, apparaissent dans des situations de développement de la lutte des classes. Historiquement, ils sont apparus sous la forme de communes ou de soviets (conseils). De la même façon dont les communistes ne peuvent atteindre une position de direction politique que lors de situations exceptionnelles, les organes de masse que crée la classe ouvrière, et qui rendent la direction communiste possible, n’apparaissent qu’au cours de périodes de montée des luttes. Cependant, hors de ces situations, le parti doit faire avancer son travail de direction politique et de développement de l’avant-garde de la classe. Le devoir permanent des communistes est de participer aux luttes ouvrières, de les stimuler et d’indiquer le chemin à suivre. La possibilité d’un développement favorable des luttes hors du niveau immédiat duquel elles ont surgi, jusqu’à l’arène plus large de la lutte politique contre le capital, dépend de la présence active des communistes sur les lieux de travail. C’est l’objectif de l’organisation communiste d’organiser les travailleurs conscients dans les lieux de travail, non pas en vue d’une activité syndicale, mais en tant que lien direct entre le parti et la grande masse de la classe ouvrière. - Le processus révolutionnaire qui commença en Russie par la victoire d’Octobre fut interrompu quand l’État russe se replia sur lui-même en défense de ses fondements économiques capitalistes. Ce fut le résultat de l’isolement de la Russie soviétique, et de la défaite des vagues de luttes prolétariennes dans les principaux pays européens. Cette expérience a démontré de façon définitive aux marxistes que le socialisme dans un seul pays est une impossibilité. Aucun État socialiste ou révolutionnaire ne peut exister à l’extérieur d’un processus révolutionnaire international réel. Cela ne veut pas dire que lorsqu’une insurrection prolétarienne a triomphé dans un pays en particulier, elle ne puisse pas exprimer un véritable pouvoir prolétarien. Cela veut dire cependant, qu’à moins que des mouvements révolutionnaires ne triomphent ailleurs, et ouvrent la possibilité concrète d’entreprendre la construction de nouvelles relations sociales, il sera impossible pour ce pouvoir naissant de se maintenir.
- Dans la seconde moitié des années 20, l’Internationale Communiste était désormais complètement dominée par le Parti russe, et de ce fait n’était plus un outil utile pour la poursuite des besoins stratégiques et tactiques de la classe ouvrière internationale. Ce qui restait du potentiel de révolution en Europe et en Chine était miné par les politiques du Komintern, maintenant entièrement soumis aux besoins de survie de l’État russe. En URSS même, l’interruption du processus révolutionnaire mena à la consolidation d’une dictature anti-ouvrière sous Staline basée sur des rapports sociaux capitalistes. Le développement d’un tel régime dans un pays aussi vaste que l’URSS signifia sa réémergence en tant que puissance impérialiste. C’est avec cette caractéristique que l’État stalinien et les divers partis nationaux communistes participèrent d’abord à la guerre en Espagne, puis à la Seconde Guerre mondiale. Après la Seconde Guerre mondiale, l’impérialisme russe s’empara des pays d’Europe de l’Est qui adoptèrent alors le modèle stalinien du capitalisme d’État. La faillite de la perestroïka, et l’écroulement de ce bloc, ne furent pas le signal que l’ "État ouvrier" avait finalement complété sa dégénérescence, mais la preuve de la profondeur de la crise capitaliste dans la plus faible des "superpuissances".
- En Chine, à travers un parcours différent, on aboutit au même résultat, c’est-à-dire à un capitalisme d’État qui est encore aujourd’hui en train de chercher son rôle au sein du système impérialiste international. La différence essentielle dans l’histoire chinoise est qu’elle n’a jamais connu de révolution prolétarienne similaire à l’Octobre russe de 1917. L’histoire du présent régime chinois débute par la défaite tragique du mouvement prolétarien de Canton et de Shanghai en 1927. Elle fut suivie d’une guerre nationale conduite par un bloc de classes dans laquelle la paysannerie servit de troupes de choc. Elle se termina par l’établissement d’un régime sous les auspices staliniens, et fondé sur le même genre de rapports capitalistes d’État hautement centralisés. Ce régime, qui rompit avec la sphère d’influence russe dans les années 60, sous la bannière du néo-stalinisme, se retrouva orienté vers les États-Unis dans les années 70. Mais ces revirements, apparemment contradictoires, étaient le résultat de tentatives pour maintenir le contrôle de l’économie et pour encourager l’accumulation du capital. La Chine n’a jamais été une puissance prolétarienne, et l’idéologie du maoïsme n’était rien de plus qu’un moyen pour embrigader les masses afin qu’elles sacrifient leurs intérêts au bénéfice du capital national.
- Les points précédents démontrent qu’il est grand temps de travailler activement à la construction du parti révolutionnaire international: le Parti International du Prolétariat. La tâche de combattre l’assujettissement politique du prolétariat aux forces de la réaction et de la guerre doit être développée aussi effectivement que les maigres forces des révolutionnaires le permettent, ce qui exige leur organisation et leur centralisation à l’échelle internationale. Le processus par lequel il y a passage des luttes fragmentaires actuelles des forces révolutionnaires éparpillées à travers le monde, aux affrontements politiques et militaires de demain du parti révolutionnaire international, exige le maximum d’efforts de la part des communistes pour assurer l’homogénéisation et l’organisation de nouveaux cadres. La formation du Parti International du Prolétariat passera par la dissolution des diverses organisations "nationales" qui ont œuvré ensemble et qui sont en accord avec la plateforme et le programme de la révolution. Le Bureau International Pour le Parti a comme objectif d’être le centre de coordination et d’unification de ces organisations. Ses statuts fourniront la base pour l’homogénéisation organisationnelle qui, éventuellement, résultera de la dissolution des organisations affiliées et leur centralisation dans une structure véritablement révolutionnaire. Alors, le Bureau aura accompli la tâche qu’il s’était fixée.
Version française, revue et corrigée en janvier 2006
(1) Battaglia Comunista: journal du P.C.Int.
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