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Accueil ›Hongrie 1956 - Mythes et réalité
Le 50e anniversaire de la révolte des ouvriers hongrois d’octobre 1956 nous donne l’opportunité de démolir à la fois le mythe des réactionnaires voulant que celle-ci ne fut qu’un soulèvement nationaliste sans contenu prolétarien particulier, que la légende des libertaires qui refusent d’analyser les raisons de sa faillite et son aspect national pour plutôt louanger la forme conseilliste qu’elle adopta. Cet anniversaire nous donne aussi l’occasion d’en tirer quelques leçons valables pour la lutte des classes aujourd’hui. C’est pourquoi nous publions pour la première fois en français cet article paru dans Workers Voice à l’automne 1981, à l’occasion du 25e anniversaire des événements. À la lecture de cet article plus de deux décennies plus tard, il nous semble aujourd’hui un peu facile d’expliquer l’absence d’un parti révolutionnaire par le boom économique d’après-guerre puisque cette période de prospérité n’a aucunement bénéficiée au prolétariat hongrois. Cependant le message essentiel de l’article conserve à notre avis toute sa pertinence. Workers Voice était édité à l’époque par nos camarades de la Communist Workers Organisation qui allait contribuer à la formation du BIPR deux années plus tard. Nous avons joint à l’article une brève chronologie pour en faciliter la compréhension. De plus, dans l’esprit de rendre hommage aux prolétaires qui se sont soulevés contre le capitalisme d’État en Europe de l’Est en 1956, nous joignons à ce dossier la traduction d’un tract distribué la même année en Italie par nos camarades de Battaglia Comunista suite à la révolte ouvrière dans la ville polonaise de Poznan. Enfin, on trouvera quelques paroles du philosophe Jean-Paul Sartre sur les événements et ce que nous en pensons.
Mise en situation
La révolte des ouvriers hongrois de 1956 fut le point culminant d’une série de grèves et de révoltes spontanées qui a mené à l’effondrement de la période stalinienne de l’impérialisme russe. Déjà avant la mort de Staline, des ouvriers en grève en Tchécoslovaquie durent faire face aux fusils russes en 1952. Après la mort de Staline en 1953, l’Europe de l’Est est en effervescence. La grève spontanée devenue révolte à Berlin-Est, de nouvelles grèves en Tchécoslovaquie, suivies des plus importantes grèves en Hongrie depuis 1946 avaient toutes fait comprendre au Bureau politique russe que des politiques plus subtiles devraient dorénavant être employées si la Russie devait conserver le contrôle des États à sa solde.
Le résultat des délibérations du Bureau politique fut la décision d’abandonner la dictature de type stalinienne en Europe de l’Est en faveur d’un "esprit de direction collective". Les dirigeants du parti hongrois furent convoqués à Moscou et sous les ordres du Kremlin, Imre Nagy devint Premier ministre et fut permis d’introduire son "Cours nouveau". L’essence du Cours nouveau visait à conjurer l’agitation populaire en apaisant les paysans par la dé-collectivisation des terres et un retour au capitalisme agricole privé ainsi qu’à calmer l’opposition de la classe ouvrière en améliorant les conditions de vie. Ce dernier objectif serait accompli en reconvertissant une partie de l’industrie lourde vers la production de biens de consommation. Cependant, l’enthousiasme de Nagy pour sa "voie hongroise vers le socialisme" lui valut l’opposition du Bureau politique russe et des staliniens dans la direction du Parti "communiste" hongrois. En 1955, il fut démis de ses fonctions et exclu du parti.
Pendant ce temps, la classe ouvrière d’Europe de l’Est continuait à combattre l’exploitation. Le discours de Khrouchtchev dénonçant Staline en février 1956, visant à permettre un rapprochement avec Tito et à éviter plus de "troubles", ne fit qu’éveiller de plus grands espoirs en de meilleures choses à venir. Tandis que la classe moyenne se mettait à penser à l’indépendance nationale et donnait naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui des groupes "dissidents", la classe ouvrière exigeait les améliorations promises à leur niveau de vie et à leurs conditions de travail. En juin, une grève de masse des ouvriers de Poznan fut réprimée par l’armée polonaise. Lorsque la nouvelle des grèves polonaises atteignit la Hongrie, des grèves de solidarité éclatèrent à travers tout le pays. Le Parti "communiste" hongrois (PC) tenta d’acheter les ouvriers par des promesses de réformes. Le Bureau politique avait ordonné la démission de Rakosi en juillet et dès avant le 14 octobre, Nagy était réadmis dans le parti.
L’AVO déclenche la révolte
L’incident qui allait déclencher la révolte fut l’assassinat de manifestants sans armes par la police politique (AVO) à l’extérieur de l’édifice de la radio d’État à Budapest. Le matin du 23 octobre, des étudiants et des intellectuels petit-bourgeois (professeurs d’université, journalistes, etc.) avaient répondu à l’appel du Cercle Petofi de manifester "pour exprimer...notre solidarité avec nos frères polonais." La nouvelle qu’en Pologne, Gomulka avait remplacé le stalinien Rokossovski à titre de Premier secrétaire du Parti "communiste" polonais venait d’atteindre la Hongrie. En fin d’après-midi, des travailleurs avides de voir défier le monopole d’État sur l’information et entendre la diffusion des revendications de l’Union des écrivains rallièrent la manifestation. Lorsqu’il devint clair que cela n’arriverait pas, l’AVO voyant que la colère de la foule augmentait, fit feu. Cela mena à une révolte armée.
Pendant la nuit, des travailleurs et des étudiants s’armèrent (en se fournissant dans des usines d’armes et de munitions et par des armes fournies par des soldats et des policiers). Dès avant le lendemain matin, le gouvernement hongrois avait demandé à la Russie d’envoyer des troupes stationnées en Hongrie pour mater une insurrection "fasciste" et "contre-révolutionnaire". Il n’y a aucun doute que la révolte n’avait pas été planifiée.
Le mythe nationaliste
Il est certain que l’opposition des intellectuels petit-bourgeois au régime en Hongrie était basée sur le nationalisme. Le Cercle Petofi prenait son nom d’un poète hongrois de la révolte nationale contre l’Empire autrichien au XIXe siècle. Son slogan de solidarité avec ses "frères polonais" n’était pas la solidarité prolétarienne d’une classe exploitée internationalement dans un pays avec les membres de leur propre classe dans tous les autres pays. Ce n’était qu’une expression désuète de sympathie de la bourgeoisie hongroise à l’égard de la bourgeoisie polonaise dont le destin commun était de voir leur liberté restreinte par l’impérialisme russe.
Les mots d’ordre du 23 octobre ne reconnaissaient pas de "frères" russes. La "liberté" qu’ils exigeaient était la liberté des "Hongrois" de gérer "leurpropre" économie et de déterminer "leurpropre" politique étrangère, indépendante de la Russie. En d’autres mots, c’était la voix du capitalisme hongrois exigeant que les profits générés par les travailleurs hongrois soient retournés à l’État hongrois qui serait alors libre d’en disposer à sa guise. Il n’y fut pas fait mention de la liberté de la classe ouvrière de la Hongrie, de la Pologne ou d’ailleurs - la liberté de l’exploitation qui ne peut arriver qu’en mettant fin au système de travail salarié et de la production pour le profit plutôt que la production directe de biens en fonction des besoins de la population.
La force du nationalisme
Comment expliquer le fait que les travailleurs hongrois combattirent et périrent par milliers dans une révolte dominée par des objectifs politiques nationalistes bourgeois?
En premier lieu, les travailleurs hongrois, comme les travailleurs ailleurs, ne comprenaient pas que le socialisme est incompatible avec le nationalisme. Il n’y avait pas d’organisation révolutionnaire en Hongrie pour expliquer que la lutte contre l’impérialisme ne pouvait réussir que lorsqu’elle fait partie d’une lutte ouvrière internationale contre le capitalisme partout. Le politicien réformiste Nagy derrière lequel les ouvriers se rangèrent croyait qu’il était possible de poursuivre "une voie hongroise vers le socialisme" - une voie nationale qui pouvait être suivie indépendamment de la Russie ou de l’Amérique.
Deuxièmement, la classe ouvrière hongroise ne comprenait pas que le système politique en Europe de l’Est n’avait rien à voir avec le communisme.
Influencés par le titisme en Yougoslavie, les travailleurs hongrois pensaient que le système stalinien pouvait se réformer et devenir socialiste. Encore une fois, il n’y avait pas d’organisation révolutionnaire pour indiquer que l’autogestion proclamée en Yougoslavie cachait le fait que la classe ouvrière restait exploitée. Que ce soit dans la Russie de Staline, la Hongrie de Rakosi ou la Yougoslavie titiste, le travail salarié et donc la production pour le profit persistait. Alors que sous le capitalisme privé, les profits produits par le surplus de la force de travail ouvrier vont au capitaliste individuel, en Europe de l’Est (et dans les autres soi-disant États socialistes) ils sont appropriés par l’État. Mais la propriété d’État sur l’industrie lorsque les travailleurs n’ont pas le contrôle de l’État ne signifie pas que le socialisme existe. Cela veut dire que le système est capitaliste d’État. En 1917, la classe ouvrière russe sous la direction du Parti bolchevik avait prit le pouvoir d’État mais elle l’a perdue à nouveau suite à l’isolement qui suivit l’échec des insurrections prolétariennes à l’Ouest (1919-1921). Un des plus grands mythes que les révolutionnaires d’aujourd’hui doivent combattre est le mythe que la Russie est toujours communiste. En 1956, il n’y avait pas de parti révolutionnaire en Hongrie et conséquemment les travailleurs restèrent confus sur leurs véritables intérêts et sur comment aller de l’avant dans leur lutte. Il n’est pas étonnant que les objectifs politiques de la classe moyenne soient restés dominants.
L’internationalisme prolétarien
Les conséquences pratiques en furent tragiques. Lorsque les troupes russes avancèrent pour écraser la révolte, les travailleurs hongrois n’adoptèrent pas une politique de défaitisme révolutionnaire. Ils ne firent pas appel à la solidarité de classe des soldats russes et n’employèrent pas une politique de fraternisation systématique. Ce n’est qu’en gagnant leurs camarades ouvriers sous uniforme à leur cause et en appelant les travailleurs de l’armée ennemie à se révolter contre leurs propres dirigeants que la classe ouvrière peut espérer voir un jour sa révolution réussir. Le fait que plusieurs exemples de fraternisation spontanée se soient produits entre insurgés hongrois et soldats russes ne fait que souligner leur importance. Dès lors que les soldats russes comprirent qu’ils n’étaient pas là pour combattre une révolte fasciste mais bien des "travailleurs ordinaires" ils hésitèrent à le faire. Combien plus efficace une telle politique de fraternisation aurait pu être dès le départ! Comme un Russe l’a expliqué,
C’est difficile de ne pas riposter lorsqu’on vous tire dessus de tous les cotés.
De fait, le gouvernement russe était conscient du danger (de son point de vue) de la fraternisation et de la réalité des désertions. Durant la deuxième ronde de combats, il engagea deux divisions "d’orientaux non contaminés" pour réduire le risque de la fraternisation. Malgré cela, il y eut des rapports de soldats russes rapatriés dans des trains scellés.
À cause de l’absence de leur propre direction politique, les travailleurs hongrois n’ont pu exploiter cette situation en fonction de tout son potentiel. Les germes d’une politique de défaitisme révolutionnaire étaient évidents dans la citation rapportée plus haut et dans les paroles du travailleur hongrois qui a dit:
Je me suis retrouvé à tirer sur des jeunes paysans ukrainiens affolés qui avaient autant de raisons de détester ce que nous combattions que nous... Ce fut un choc amer de constater que même dans une révolution, on ne peut confronter le véritable ennemi.
Mais ces germes ne se développèrent pas en une politique internationaliste plus générale. L’internationalisme prolétarien ce n’est pas combattre les chars d’assaut mais plutôt fraterniser avec les travailleurs qui les conduisent et transformer l’invasion impérialiste en guerre de classe.
La résistance des travailleurs hongrois à l’impérialisme et à l’exploitation devint de plus en plus formulée en mots d’ordre nationalistes et les cas de fraternisation diminuèrent. Des milliers de travailleurs et de travailleuses sont morts, non pas au nom de la révolution prolétarienne mondiale mais pour la cause de Nagy - un élément loyal de la classe dominante et un capitaliste d’État qui imaginait naïvement que la Russie permettrait à son satellite hongrois de quitter le Pacte de Varsovie et retourner au système multipartite de la démocratie libérale.
Le fondement de la lutte ouvrière
Cela ne veut pas dire que la Hongrie de 1956 n’avait pas de contenu prolétarien positif.
La classe ouvrière est motivée à agir en fonction de raisons matérielles, pas seulement pour des notions abstraites comme la liberté. Plus que tout, ce fut la brutalité constante et l’exploitation massive du stalinisme qui mena à la révolte de 1956. En 1956, les travailleurs hongrois étaient en fait dans une situation pire qu’avant 1949. Un groupe "national-démocratique" qui émergea après la révolte a calculé sur la base des statistiques officielles que le niveau de vie des travailleurs hongrois en 1956 était de 17% inférieur à celui de 1949. En 1956, 55% des familles hongroises vivaient sous "le niveau de vie minimum" officiel. Le salaire quotidien d’un travailleur d’une ferme étatisée ne suffisait pas à acheter un kilo de pain; 15% des ménages manquaient de couvertures pour dormir et 20% des travailleurs n’avaient pas de manteaux d’hiver.
Lorsque la révolte hongroise éclata enfin, les revendications ouvrières - par exemple des salaires plus élevés et la fin du système notoire de travail à la pièce - apparurent aux côtés de celles des nationalistes. Afin de se battre pour ces revendications, les travailleurs durent créer leurs propres organes de lutte - des comités d’usines et des conseils ouvriers. Le premier comité d’usine se forma dans une manufacture d’ampoules électriques à Budapest peu après le début des combats. Dans moins d’une semaine, des comités d’usines avaient été formés dans tous les centres industriels majeurs de la Hongrie et par le 29 octobre, ils commençaient à établir des liaisons et envoyer des délégués pour former des conseils ouvriers locaux.
Le mythe conseilliste
Les conseils ouvriers (ou soviets) constituent le fondement de la démocratie prolétarienne. Composés de délégués élus directement par les travailleurs dans les usines et révocables en tout temps, les conseils ouvriers sont les organes par lesquels la classe ouvrière exercera son pouvoir politique une fois que l’appareil d’État capitaliste aura été fracassé. Ce dernier point est très important. Pour les anarchistes et les conseillistes, la seule existence de conseils ouvriers en Hongrie constitue la preuve que c’était une "révolution".
Pourtant, nous avons déjà vu que la classe ouvrière ne reconnaissait pas les systèmes hongrois et russe pour ce qu’ils étaient - des systèmes capitalistes d’État. Ils croyaient que le socialisme pouvait être atteint en réformant le système existant - en décentralisant plutôt qu’en renversant l’État. Ainsi, même si les comités d’usine et les conseils locaux restèrent en existence après la deuxième attaque russe et malgré une grève d’un mois à Budapest, les dirigeants des conseils insistaient sur leur fonction "non-politique". En d’autres mots, ils nièrent que les conseils aient eu l’intention de défier le pouvoir de l’État hongrois. La lutte des travailleurs hongrois était condamnée à s’estomper au nom de l’autogestion et des syndicats libres. Déjà, des milliers de travailleurs étaient morts pour un capitalisme d’État "réformé"; dans les prochains mois, plusieurs autres vivraient les terribles épreuves de grèves prolongées, des arrestations et des emprisonnements dans l’espoir que gagner le droit d’élire leurs patrons et de fonder des syndicats indépendants des syndicats officiels serait un pas vers le socialisme.
L’armée russe agira avec une certaine discrétion avec les conseils jusqu’à ce que la grève à Budapest s’essouffle et le temps que le gouvernement fantoche de Kadar renforce sa prise. En reconnaissance du fait qu’ils s’en tenaient à des revendications "non-politiques", l’armée russe coopéra avec les conseils et les traita comme une force de stabilisation jusqu’à ce que "l’ordre" puisse être restauré. Ainsi, des listes de noms de membres dirigeants des conseils furent remises à l’armée russe pour faire en sorte que ceux-ci puissent être libérés sur instructions de cette dernière en cas d’arrestations. Au début du mois de décembre, le Conseil central de Budapest fit même appel au gouvernement russe contre les tentatives de Kadar de le dissoudre!
La direction du Conseil n’a pu agir ainsi que parce qu’elle croyait que la Russie était socialiste. Inutile de préciser que les Russes ne sont pas intervenus pour protéger les conseils contre Kadar. Pour ajouter à la confusion, le Conseil central de Budapest décida secrètement de convoquer un Conseil national qui ferait fonction de "parlement ouvrier" jusqu’au premier anniversaire de la révolte alors que se tiendraient des élections à une assemblée nationale - sur une base multipartite!
Ce n’était pas là des actions d’organisations se préparant à renverser le capitalisme ou l’ayant déjà fait. Ces actions démontrent que les conseils ne comprenaient pas vraiment pourquoi ils existaient ni à quel point ils avaient sombré dans le nationalisme.
Les mythes
Contrairement au mythe libertaire, la recette d’une insurrection non-planifiée et sans parti politique pour diriger la classe mena à un bain de sang dans lequel les travailleurs croyaient qu’ils se battaient pour le socialisme alors qu’en fait, ils se sont battus et se sont sacrifiés pour le nationalisme bourgeois et l’introduction d’une forme plus libérale du capitalisme. La cause de la défaite des travailleurs hongrois ne fut pas seulement l’action de l’armée russe mais aussi leur manque de compréhension de leurs propres intérêts. Mais plus encore, les événements de Hongrie de 1956 démontrent que sans une direction politique organisée, la création des conseils ouvriers seule ne mène pas automatiquement à la révolution.
Nous ne pouvons condamner la classe ouvrière hongroise pour ce manque de conscience de classe il y de cela 25 ans. Nous n’attendons pas non plus l’émergence d’un mouvement révolutionnaire "pur" pour que la classe ouvrière se "décontamine" entièrement des idées bourgeoises. Chaque révolution commence avec une certaine contradiction entre les actions prolétariennes et les idées bourgeoises. Ce qui assure la victoire de l’action prolétarienne est l’activité de la minorité communiste au sein de la classe. En Hongrie en 1956, il n’y avait pas de minorité communiste puisque la présente crise mondiale n’avait pas commencée. Suite à la Deuxième Guerre mondiale, le capitalisme prospérait et les confusions politiques de la contre-révolution dominaient toujours la classe ouvrière. Les conditions pour la croissance d’un parti révolutionnaire n’étaient pas encore mûres. La Russie fut capable d’empêcher d’autres révoltes sérieuses parmi ses satellites jusqu’en 1968 en faisant des concessions sur les collectivisations, les conditions de commerce, etc.; ce qui permit des améliorations graduelles du niveau de vie. Après le Printemps de Prague, l’agitation ouvrière en Hongrie fut conjurée par l’introduction d’une forme d’autogestion des usines.
Ce que les travailleurs avaient revendiqué sans succès contre le gouvernement Kadar des années plus tôt fut introduit comme une "réforme" par le même gouvernement après 1968. En Pologne aujourd’hui, Solidarnosc a fait dévier la lutte ouvrière en une lutte pour des "syndicats libres" et le "contrôle ouvrier de la production". Mais aucune de ces mesures ne pourra empêcher les travailleurs polonais ou hongrois de sentir les effets de la crise, de subir l’austérité. Aujourd’hui, l’État russe doit renflouer l’économie de la Pologne même si cela veut dire l’extension de la crise polonaise à tous les pays du Pacte de Varsovie. Plus que jamais auparavant, le prolétariat mondial tant à l’Est qu’à l’Ouest vit la même baisse des niveaux de vie, les mêmes transformations des circonstances matérielles qui sont à la base de la révolution internationale. C’est aux révolutionnaires de relayer les leçons du passé au service de la classe ouvrière. Nous devons nous assurer que dans la lutte mondiale à venir, la classe ouvrière connaît bien le chemin vers la révolution. Que la révolte des ouvriers hongrois de 1956 serve de témoignage de ce que nous comprenons aujourd’hui:
- La Russie n’est pas communiste.
- Le nationalisme et le socialisme sont incompatibles. À l’Est comme à l’Ouest les luttes ouvrières sont parties intégrantes de la même lutte des classes internationale. "Les prolétaires n’ont pas de patrie" (Marx).
- La classe ouvrière doit former son propre parti politique pour mener la révolution.
- L’État doit être fracassé - il ne peut être réformé dans l’intérêt des ouvriers. Le seul véritable contrôle ouvrier est la dictature du prolétariat.
Notes Internationalistes #07
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