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À l'occasion de la marche du 15 juin sur Queens Park
La crise mondiale du capitalisme tue! Seule la classe ouvrière offre une solution à l'humanité Camarades ouvriers, Camarades ouvrières, Les travailleurs et les travailleuses de l'Ontario, avec ou sans emploi, sont présentement sous les feux d'une attaque généralisée. L'offensive tous azimuts de l'État contre les conditions de vie et de travail de notre classe n'a pas de précédent récent et elle sème une pauvreté croissante, l'insécurité et la mort parmi nous. La manifestation d'aujourd'hui, regroupant principalement des prolétaires sans-emploi et sans-logis, est un événement important visant à exprimer notre colère et notre écoeurement face à un système qui traite la classe ouvrière soit comme du bétail, soit comme des déchets.
Dans le sillon de sa coupure de 21,6% à l'aide sociale en 1995, le gouvernement provincial a causé beaucoup de souffrances parmi les centaines de milliers de sans-emploi. Conjuguée aux coupures à l'assurance-chômage du gouvernement fédéral, cette mesure a aidé les patrons à faire reculer les salaires dans les usines, les mines et les services. Depuis ce temps, l'État a adopté des politiques encore plus draconiennes, notamment l'interdiction à vie de l'aide sociale pour toute personne trouvée coupable d'avoir effectué une déclaration incomplète ou "frauduleuse" à l'État. Des attaques semblables contre le contrôle des loyers et le logement social ainsi que l'adoption du très mal nommé "Tenant Protection Act" ont entraîné encore plus de détresse à travers la province. Tout cela a crée une situation où de plus en plus de gens sont acculés à faire un choix inhumain: payer le loyer, ou acheter de la nourriture; tandis que ceux et celles que cette impasse a jeté à la rue, y perdent souvent la vie. Toronto est maintenant l'épicentre d'une poussée fulgurante de l'itinérance que les chiffres officiels estiment à entre 50 000 et 75 000 personnes. À chaque hiver, des êtres humains meurent de froid dans les rues de Toronto. Afin de contrôler cette masse d'individus en détresse se déversant dans la rue, l'État a aussi renforcé son appareil de répression. C'est ainsi qu'il a fait voter un "Safe Streets Act" criminalisant la mendicité et la pratique du squeegee. La ville de Toronto a aussi développé un programme nommé "Targeted Policing" dans le but de chasser les pauvres et les sans-logis de son territoire.
Un état de guerre Loin de limiter ses attaques aux seuls sans-emploi, nous assistons à une guerre totale menée par l'État contre l'ensemble de la classe ouvrière; une guerre de classe où la bourgeoisie réalise des gains importants à notre détriment.
Les dépenses publiques ont diminué radicalement. Même si l'économie ontarienne a connu une croissance de plus de 3% par année, les dépenses ont diminué de 15,1% du PIB en 1995-96 à 12,2% en 1999-2000; un énorme 20%! Des coupures importantes et des congédiements massifs ont été imposés à tous les services d'une quelconque utilité à la classe ouvrière. Une liste partielle inclut:
- une réduction énorme de 1.307 milliard dans les hôpitaux avec pour conséquence la fermeture de 35 hôpitaux à travers la province et 10 000 pertes d'emplois dans la seule région du Toronto métropolitain;
- des coupures énormes totalisant 1.5 milliard dans les écoles publiques auxquelles s'ajoutent 400 millions pour les collèges et les universités.
Les frais de scolarité ont aussi augmenté de 10 à 20% et des milliers d'enseignants et d'enseignantes ont perdu leurs postes;
- un minimum de 13 000 postes a été supprimé dans la fonction publique ontarienne et le premier ministre Harris a admis qu'au total, 22 000 emplois sont menacés;
- l'Agence de santé et de sécurité au travail a été tout simplement dissoute; ce qui favorisera l'augmentation des accidents de travail et des maladies industrielles.
Pour finir, la tragédie de Walkerton a mis à jour les conséquences mortelles qu'ont ces politiques réactionnaires pour la vie quotidienne de la classe ouvrière et l'avenir de toute l'humanité. Dans cette petite localité, plusieurs personnes sont mortes à cause de la présence de la bactérie E-coli dans le réseau municipal d'approvisionnement d'eau potable. L'appareil d'État provincial avait presqu'éliminé les sommes destinées à la construction et la réparation des systèmes de distribution d'eau et de traitement des égouts. De plus, le ministère de l'Environnement a été fortement affaibli par une réduction de 36% de son budget et le renvoi de 752 fonctionnaires.
En vérité, se débarrasser du système capitaliste est devenu une question de survie qui s'aggrave toujours plus, à mesure que la crise d'accumulation du capital s'approfondit à l'échelle de la planète.
Une offensive mondiale Notes Internationalistes apporte son appui à cette manifestation. Nous connaissons plusieurs des camarades qui ont trimé dur pour l'organiser et nous respectons leur intégrité et leur détermination. (1) Mais nous avons cependant d'importantes divergences politiques sur la stratégie utilisée par le "mouvement anti-pauvreté" et nous croyons utile de critiquer ce que nous considérons comme des insuffisances majeures. Comme toute l'histoire du mouvement ouvrier nous l'enseigne, une attitude combative, aussi "radicale" fut-elle, ne suffit malheureusement pas pour vaincre. Si c'était le cas, nous ne serions probablement pas encore pris dans cet enfer. Outre son indignation et sa combativité, la classe ouvrière doit savoir identifier clairement son ennemi et sa nature, la base et l'étendue de ses attaques, ainsi que la voie menant à une société nouvelle et meilleure. En 1848, Marx et Engels écrivaient qu'il fallait "comprendre clairement les conditions, la marche et les résultats généraux du mouvement prolétarien" (Manifeste du Parti Communiste). C'est cette compréhension qui manque le plus à notre classe et à ce mouvement "anti-pauvreté". Nous n'affirmons pas cela par sectarisme ou simplement pour nous différencier des organisateurs ou de certains cercles gauchistes. Pour les communistes internationalistes, cette approche est éminemment pratique et indispensable au changement révolutionnaire. Les prolétaires doivent tirer les leçons des luttes du passé et construire une organisation qui ouvrira le chemin à une activité pratique qui contribuera à la chute finale du capitalisme international. Dans cet esprit nous mettons de l'avant les critiques suivantes.
1
Cette bataille dépasse la personne de Mike Harris Aussi détestable, ignorant et insignifiant fusse-t-il, cette bataille ne se doit pas se résumer à se débarrasser de Mike Harris. L'Ontario a peut-être coupé certains programmes un peu plus que d'autres gouvernements provinciaux, mais elle reste en concordance avec les coupures et les congédiements ordonnés par l'État fédéral et toutes les autres administrations provinciales canadiennes. Partout sur la planète, des gouvernements dirigés par des partis de toutes les teintes (conservateurs, libéraux, nationalistes, travaillistes, staliniens, démocrates, verts ou sociaux-démocrates), appliquent en parfaite harmonie le même programme capitaliste: attaquer la classe ouvrière dans le but de maintenir les taux de profits.
Posez-vous la question: La tragédie "conservatrice" de Walkerton est-elle vraiment pire que les hécatombes ferroviaires du "Labour" britannique? Les coupures "droitières" de Harris dans l'aide sociale sont-elles plus condamnables que la persécution des pauvres par le gouvernement de "centre-gauche" de Clinton aux USA? Doit-on absolument mesurer le détail et différencier les nuances et les degrés de l'horreur capitaliste? Ces campagnes spécifiques à l'encontre de tel politicien ou de tel parti ne sont-elles pas le fondement-même de la démocratie bourgeoise et de ses mensonges? Mettre le haro sur un Harris ou un Chrétien, en fonction du sujet de la manifestation ou de son emplacement, ouvre la porte à toute la panoplie de la récupération parlementaire. Malheureusement, au-delà de leurs discours radicaux, émotifs et d'une grande éloquence, nos activistes "anti-pauvreté" s'en tiennent généralement à dénoncer les crimes de tel personnage politique ou la corruption de tel parti gouvernemental. Malgré les intentions anticapitalistes à la base de ce type d'activisme gauchiste, habituellement justifié par des considérations tactiques, on ne fait que semer des illusions sur la pertinence d'une alternative électorale plutôt qu'une approche révolutionnaire claire et unifiée. C'est une tactique qui cache la vérité à la classe ouvrière. En Ontario, elle joue le jeu du Nouveau parti démocratique, des libéraux et de tous les racketteurs de la gauche capitaliste pendus à leurs basques.
Les révolutionnaires doivent tirés les conclusions pratiques et générales de l'échec absolu des tactiques parlementaires adoptées il y a plusieurs décennies. Les élections ont fait la preuve de leur inutilité en vue de développer un rapport de force ou d'obtenir des résultats durables. Qui plus est:
la classe ouvrière ne peut conquérir le pouvoir politique par l'élection d'une majorité au parlement. Croire que la classe dominante permettrait un passage législatif au socialisme, c'est faire preuve de "crétinisme parlementaire" (Marx). De plus, le parlement agit comme un paravent dissimulant la dictature de la bourgeoisie sur la société. Dans les sociétés capitalistes démocratiques, les vrais organes du pouvoir sont la bureaucratie d'État, les forces de sécurité et les capitalistes eux-mêmes; pas le parlement. Le parlement n'est même plus le "comité exécutif de la classe dominante". Son utilité réside dans le fait qu'elle donne l'illusion d'offrir un choix dans la société bourgeoise. Dans l'isoloir, coupés de la conscience de leurs intérêts collectifs, les prolétaires n'ont que le choix de la faction capitaliste à laquelle ils préfèrent se soumettre. (2)
Harris, Chrétien et Bouchard ne sont que des acolytes commodes et remplaçables. Un véritable progrès exige la suppression de l'ensemble de la structure étatique bourgeoise.
2
Cette bataille ne sera pas gagnée avec les syndicats Pour faire des gains, il faut gagner l'ensemble de la classe ouvrière à la lutte. Les sans-emploi, laissez à eux-mêmes, n'y arriveront pas. Des maillons d'acier doivent être forgés avec les travailleurs et les travailleuses des usines, des mines et des services pour construire une puissante chaîne de solidarité. L'énorme potentiel d'une classe ouvrière unie et en action fut démontré il y a quelques années, lors des Ontario Days of Action. Des villes entières furent paralysées pour une journée et des centaines de lieux de travail furent frappés par des grèves. La grève générale de Toronto fut marquée par la plus grande manifestation politique de l'histoire du Canada. Et puis...Que c'est-il passé? Les syndicats qui, sous des airs militants, avaient prétendu paralyser la province, n'ont finalement paralysé que... la lutte. Doit-on s'en étonner? La grève historique des 126 000 enseignants et enseignantes de l'Ontario contre le Bill 160 ne venait-elle pas aussi d'être sabotée par les syndicats? Toutes les luttes importantes à travers le monde, depuis le Front Commun québécois de 1972 jusqu'aux grèves françaises de décembre 1995, ont ultimement été liquidées par les syndicats. Nous devons nous en méfier et la parole devrait leur être interdite à la tribune de nos manifestations! À l'origine, les syndicats ont été des outils efficaces dans les luttes des prolétaires pour améliorer leurs conditions. Mais, sous l'impérialisme, ils ont tendu à s'intégrer à l'appareil de planification de l'État bourgeois. Lorsqu'ils sont confrontés à des prolétaires en lutte, les syndicats cherchent inévitablement à contenir le combat. Mais même si de plus en plus de prolos critiquent les syndicats, la grande majorité des militants et des militantes pensent que tout ce qui est requis est une meilleure direction.
Ceux et celles qui soutiennent que nous n'avons qu'à changer les directions pour changer les syndicats ne comprennent pas qu'aujourd'hui, c'est la fonction des syndicats qui déterminent leurs politiques réactionnaires, beaucoup plus que la direction elle-même. Pourquoi donc même les militants syndicaux les plus honnêtes se déconsidèrent à mesure qu'ils gravissent les échelons de l'appareil. (3)
Dans la vie il y a des contes de fée et il y a la réalité. La réalité des syndicats est qu'ils sont devenus des outils essentiels à la préservation du capitalisme. Ils sont de fait des organes d'État. Au-delà des discours et des prétentions "radicales", il faut s'en défier.
Comment donc les sans-emploi peuvent-ils alors rejoindre les autres travailleurs et travailleuses? On a certainement pas besoin des syndicats pour le faire car ils sont de plus en plus discrédités. La diffusion devant les lieux de travail permet des contacts directs et peut aussi être l'occasion d'organiser des collectes pour financer la lutte. Les piquets de grève sont aussi un lieu propice pour renouer les liens fracassés par la société capitaliste moderne. Les places publiques des quartiers ouvriers peuvent également devenir des lieux de rassemblement et d'intervention. Cela sous-entend bien entendu beaucoup d'efforts, mais les résultats seront à la mesure et garantissent davantage le succès que n'importe quels "appuis" ou promesses syndicales.
Camarades ouvriers, Camarades ouvrières, Le capitalisme gâche nos vies et menace l'existence de l'humanité. Nous devons d'urgence nous organiser pour l'abattre. Comme nous le déclarions dans notre manifeste du 1er mai:
Une réorganisation sérieuse de l'action de classe se doit de commencer à la base par l'élection de délégué-e-s révocables en provenance des usines et des quartiers; et par la créations d'organes de lutte, issus des luttes elles-mêmes.
Mais l'histoire nous enseigne que cela ne suffit pas pour gagner. Nous avons aussi besoin d'un parti révolutionnaire international. Un parti qui se battra à l'intérieur de ces organes de lutte, fera connaître le programme révolutionnaire, combattra les compromis et les mènera dans la voie de la révolution qui ultimement, renversera ce système pourri et meurtrier qu'est le capitalisme. La tâche de ce futur parti ne sera pas de prendre le pouvoir au nom de la classe ouvrière, comme l'argumente les staliniens, les trotskistes et les maoistes. Elle sera plutôt de se battre pour le pouvoir ouvrier, exercé par le biais de ses conseils (soviets).
Nous faisons appel à tous les prolétaires qui en ont marre de cette vie d'esclavage salarié et de misère. Rejoignez-nous dans le combat pour un avenir meilleur pour notre classe et, à vrai dire, pour toute l'humanité!
Notes Internationalistes / Internationalist Notes(1) Une des forces de leur travail de mobilisation est d'avoir consciemment encourager des travailleurs et des travailleuses de différentes cultures et régions, notamment du Québec et de la nation Mohawk, à participer à la manifestation d'aujourd'hui. La bourgeoisie, avec la complicité des forces nationalistes et réformistes, essaie toujours de diviser la classe ouvrière dans une pratique sanglante et perfide de "diviser pour régner". Le caractère internationaliste de cette manifestation est un pas dans la bonne direction.
(2) Socialism or Barbarism, Communist Workers Organisation, U.K., 1994.
(3) Idem.
Notes Internationalistes #04
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